Welcome to the Rileys : chronique

08-10-2010 - 15:54 - Par

Welcome to the Rileys : chronique

A mille lieux des blockbusters de son père Ridley et de son oncle Tony, Jake Scott signe pour son deuxième film un drame intimiste et poignant.

Voilà huit ans, Doug Riley et sa femme Loïs ont perdu leur fille unique dans un accident de voiture. Depuis, ils ne s’entendent plus, ne se parlent plus, tout juste se frôlent-ils dans une maison trop grande pour eux. Doug joue au poker avec ses potes, trompe son épouse avec une serveuse, et dirige une entreprise plutôt fructueuse. Loïs, elle, n’est pas sortie de chez elle depuis des lustres et semble attachée à un quotidien monotone, quasi monacal. Lors d’un voyage d’affaires à La Nouvelle-Orléans, Doug rencontre Mallory, jeune mineure prétendant avoir plus de 21 ans et payant ses factures en faisant la stripteaseuse dans un bouge du quartier français. Doug s’attache immédiatement à elle et ce faisant, va bouleverser sa vie, celle de Mallory et de Loïs.

Welcome to the Rileys-PosterOnze ans après GUNS 1748, film d’action aventure plutôt foutraque avec Robert Carlyle, Jonny Lee Miller et Liv Tyler, le cinéaste Jake Scott, « fils et neveu de », plus connu pour ses clips et ses pubs, revient à la réalisation de long-métrage de cinéma. Et oh surprise, signe un drame intimiste jurant (dans le bon sens du terme) avec le petit monde du cinéma indépendant américain, si prompt à répéter perpétuellement les mêmes recettes et clichés estampillés « Sundance ». C’est qu’avec WELCOME TO THE RILEYS, Jake Scott et son scénariste Ken Hixon ne cherchent jamais à faire les malins. Ici, pas de décalage cool, de voix off signifiante, de bande-son indé tonitruante. Mais une analyse subtile et humaniste des névroses et traumatismes de personnages banals, perdus dans leurs souffrances, et enfermés dans des rituels les empêchant de vivre.

Le premier tiers du film, exposant tranquillement le couple formé par Doug et Loïs via des non dits bienvenus et une ambiance pesante, n’échappe pas toujours au pathos,  entre acharnement du destin (on en dira pas plus), et peines légèrement trop appuyées. Si bien que WELCOME TO THE RILEYS danse sur deux pieds : subtilité et gros sabots. Un tir très rapidement rectifié par Scott et Hixon dès lors que Doug atteint La Nouvelle-Orléans. Son parcours initiatique, son épanouissement à une vie qui lui est niée depuis la mort de sa fille, apparaît aussi crédible que pertinent, notamment grâce à la performance sans faute de James Gandolfini. L’ancien Tony Soprano, que l’on paierait pour voir dans à peu près n’importe quoi, prouve encore une fois la mesure de son incroyable charisme, faisant de lui la personnification parfaite du col bleu que le cinéma américain actuel tend souvent à ignorer.

Welcome-to-the-Rileys-PicFace à lui, Kristen Stewart, dépourvue de ses atours de star pour adolescents, surprend par sa maturité, ne surjouant jamais une partition casse-gueule. De rebelle blessée refusant toute rédemption à jeune femme se laissant protéger par un Doug voyant en elle une fille de substitution, elle incarne Mallory avec un rare renoncement de la performance. Gandolfini/Stewart, un duo d’acteurs plutôt inattendu, auquel s’ajoute Melissa Leo. Cette splendide comédienne, nommée à l’Oscar pour FROZEN RIVER, traîne depuis des années son talent dans des séries comme HOMICIDE et TREME. En femme torturée se forçant à surmonter ses névroses et sa peine pour ne pas perdre son mari, elle déploie des trésors d’imagination, tour à tour flippante, poignante ou hilarante, pour définir avec subtilité un personnage qui aurait largement pu être détestable. Ou ennuyeux.

Dans WELCOME TO THE RILEYS, les interprétations, aussi justes soient-elles, ne s’affichent pourtant pas comme la simple occasion pour des comédiens reconnus à s’acoquiner avec le cinéma indépendant. Elles servent un récit développé avec soin, ménageant avec crédibilité l’émotion et l’humour, ne cherchant pas à prendre le public en otage, mais créant l’émotion par surprise, par la grâce d’une sincérité évidente. On fera le pari que nombre de spectateurs blasés renifleront dans leurs mouchoirs sur des images aussi communes qu’une accolade entre mari et femme, ou d’un coup de téléphone final laissant joliment le destin des personnages en suspens.

Welcome to the Rileys, de Jake Scott. USA. 1h50. Avec James Gandolfini, Kristen Stewart, Melissa Leo. Sortie le 10 novembre 2010.

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