Just Another Love Story : chronique

04-01-2010 - 10:49 - Par

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Sous son titre humble, JUST ANOTHER LOVE STORY ne raconte pas qu’une histoire d’amour comme tant d’autres. En revanche, c’est un thriller à l’efficacité redoutable.

Au cinéma, les Danois sont doués pour créer des personnages forts, froids, introvertis, et les foudroyer dans des situations intimes ou des affrontements d’une force implosive quasi-sismique. Voyez Anders Thomas Jensen dans le genre gaudriole 4 étoiles (ADAM’S APPLES, LES BOUCHERS VERTS), Nicolas Winding Refn dans le genre ultra-violent (la trilogie PUSHER), Susanne Bier dans le mélo fatal (BROTHERS, AFTER THE WEDDING), Annette K. Olesen (IN YOUR HANDS) ou Pernille Fischer Christensen (SOAP) pour le drame radicalement féministe. Plus discret, mais non moins captivant, Ole Bornedal, un jour passé à l’ouest américain pour remaker son propre LE VEILLEUR DE NUIT et travailler avec les Weinstein, est une pièce maîtresse du cinéma national : avec cette même fascination pour les personnages droits comme la justice et fermés à toute jouissance, il vous tire un thriller sous ciel grisonnant mu par une toute petite lumière d’espoir. Dans le genre pesant, on a rarement vu plus jubilatoire.

LoveStoryPosterDans la vie bien sous tous rapports de Jonas, mari et père de famille, tout va changer. Malgré lui, il provoque le crash de la voiture de Julia, une jeune femme au passé de globetrotteuse trouble. Direction l’hôpital pour une visite de courtoisie où il découvre que sa victime est devenue amnésique et malvoyante. Un mensonge maladroit plus tard, il est adopté par la famille de Julia et Julia elle-même comme Sebastian, le petit ami dont la progéniture leur avait tant parlé à l’époque de ses périples. Motus. Voilà l’occasion pour Jonas, crise de la quarantaine oblige, de réinventer sa vie sans penser à mal. Conséquences ? Pas bonnes. Malgré le postulat, JUST ANOTHER LOVE STORY se refuse au mélodrame. De la fuite en avant de quelques personnages qui s’engluent dans le mensonge, se repaissent du non-dit et paient leur amour au prix fort, Ole Bornedal tire un film radicalement noir, pesant, pas tant par le présent et ses grosses cachotteries que par ce qu’on anticipe déjà comme un dénouement vraiment moche. Il n’y a rien dans ce film, pas même un joli moment (il y en a pourtant), qui ne nous laisse, nous, spectateur de ces décisions désastreuses mais tellement humaines, reprendre notre souffle. Le gage d’un scénario envoûtant de bout en bout et de personnages foncièrement mystérieux avec qui l’on entretient une attraction/répulsion digne des grands thrillers. Car JUST ANOTHER LOVE STORY est, comme son nom l’indique, la chronique d’un amour banal : celui qui dévaste des vies pour le meilleur ou pour le pire. Tout y est : l’homme fasciné, la demoiselle en détresse, le monstre qui resurgit pour foutre l’idylle en l’air, les serments rompus. Toutes les histoires d’amour ne baignent pas dans le sang comme celle d’Ole Bornedal, certes. Encore fallait-il pervertir le conte de fée d’une touche de crachin, de grandes barres AnotherLoveStoryd’immeubles grisâtres, de couloirs d’hôpitaux verts dégueulis, de gens paumés et de familles détruites, d’une plage danoise de coquillages et de face à face d’acteurs inouïs aux gueules pas nettes (Nikolaj Lie Kaas entre autres). Hollywood ne s’y est pas trompé : le remake est en cours, produit par James Mangold et réalisé par Marc Webb (500 JOURS ENSEMBLE). Nul doute qu’il n’aura pas le dixième de l’ambiance tendue du film danois, ni un seul personnage à la raideur si émouvante de ceux créés par Ole Bornedal. Ni même le côté aigre-doux de son dénouement, pas si plombant que ça pourtant, on vous le promet.

Just Another Love Story, de Ole Bornedal, Danemark. Avec Anders W. Berthelsen, Nikolaj Lie Kaas. 1h40. Sortie le 6 janvier

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