In the Air : chronique

25-01-2010 - 11:18 - Par

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Voilà deux ans, Jason Reitman se faisait un prénom avec JUNO, chronique adolescente très formatée Sundance, qui avait mis la planète à genou. Pour confirmer, le cinéaste a trouvé la solution : passer à l’âge adulte.

Quand on se voit nommé à l’Oscar du meilleur réalisateur à 31 piges à peine pour son deuxième long métrage, qui n’avait d’autre prétention que d’observer l’adolescence avec tendresse et bienveillance cool, difficile de rebondir ? Après JUNO, Jason Reitman a dû se poser la question. Ou pas. Car quand on voit IN THE AIR, on se dit que le fils d’Ivan a la tête bien sur les épaules, mais aussi encore pas mal de choses à apprendre. Oubliant les affres de la jeunesse pour se concentrer sur la crise de la quarantaine, il livre une chronique réussie, qui se perd parfois dans un propos moralisateur.

InTheAirPosterRyan Bingham (George Clooney) est un quadra cynique et solitaire. Sa famille ? Il en est un membre fantomatique. L’amour ? Il préfère les coups d’un soir. Son but dans la vie ? Cumuler le plus de miles sur son compte American Airlines, juste pour le fun. Son hobby ? Donner des conférences sur l’importance de ne lier aucune relation sous peine de crouler sous le fardeau du lien social. Son travail ? Il est l’employé modèle d’une compagnie que les entreprises couardes engagent pour apprendre à leurs salariés qu’ils sont virés. Sauf que quand sa boîte désire se moderniser, on lui adjoint une jeunette, Natalie (Anna Kendrick), qui va bouleverser ses certitudes. Pas de bol, il va aussi tomber amoureux d’une quadra sexy et indépendante (Vera Farmiga). Un ours mal léché s’ouvrant au monde : on ne peut pas dire que IN THE AIR brille par l’originalité de son sujet. Mais trouve toute sa personnalité grâce au contexte social actuel. Initié avant la crise et les licenciements massifs, IN THE AIR n’avait sans doute aucune vocation à réfléchir sur le capitalisme. Et c’est pourtant, malgré lui, à travers ce prisme qu’il sera vu. Dès lors, l’opposition entre Natalie, tiraillée entre le cynisme de son travail et ses sentiments à fleur de peau, et Ryan, sûr de sa misanthropie, fonctionne à merveille. Natalie constitue un parfait vecteur à identification pour tout jeune actif souffrant de la nécessité de gagner sa croûte peu importe ses rêves et valeurs. Ryan, détestable en diable dès ses premières apparitions sera le méchant à dégrossir, le système à assainir.

InTheAir2Un antagonisme qui offre quelques très beaux moments de friction, des nœuds dramatiques simples mais émouvants, et aussi de purs moments de comédie. D’autant que l’inconnue Anna Kendrick, tout en subtilité et en tension intériorisée, donne à son personnage une profondeur humaine déchirante. George Clooney, toujours aussi impérial, réussit quant à lui à faire croire qu’il n’a pas grand chose à jouer, alors que le défi de rendre émouvant et attachant un homme aussi odieux et détestable que Ryan était une gageure à la seule portée d’un grand acteur. Malheureusement, des personnages redoutablement bien écrits, incarnés avec subtilité et discrétion par de grands comédiens ne suffisent pas. Car le propos de Reitman joue sur un fil. Le capitalisme c’est pas toujours cool, et même si vous subissez sa colère (le chômage, le manque d’argent, la perte de votre sécu etc), heureusement, il vous reste l’amour et la famille. Certes, on ne peut qu’abonder sur le fait que l’homme se définit par bien plus que sa condition sociale. On pourrait même dire que ces valeurs (l’amour, la famille, les amis comme seul salut) forment un parfait credo de vie. Mais la maladresse et l’insistance avec laquelle Reitman l’assène (en faisant témoigner à maintes reprises de vrais chômeurs) finit par jouer contre lui. S’achevant sur une pirouette happy-endesque quelque peu décevante, IN THE AIR laisse un goût d’inachevé en bouche. Si la rédemption de Natalie est inattendue et bienvenue, celle de Ryan semble au final forcée, quand on ressent avec évidence que Reitman, rajoutant une ultime scène ultime, aurait préféré le laisser sur le bord de la route, conscient de l’impasse qu’est sa vie, sans aucune possibilité de faire marche arrière.

In the Air, de Jason Reitman. Etats-Unis. Avec George Clooney, Anna Kendrick, Vera Farmiga. 1h50. Sortie le 27 janvier.

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