Kick-Ass : chronique

09-04-2010 - 11:13 - Par

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Depuis des mois, le marketing malin de KICK-ASS tease les geeks du monde entier, les amoureux de comics et d’ambiance dégénérée. Bonne nouvelle : le film survit à la hype.

Quand on excite l’appétit des cinéphages avec une multitude de posters chiadés, d’extraits fendards et de bandes-annonces survoltées, le risque est grand de voir le public arriver à satiété avant la sortie, ou pire, de décevoir une fois en salles. Le marketing vend KICK-ASS comme un opus différent du tout-venant, un comic book filmé complètement dégénéré, à la fois drôle, ultra-violent et pop. Preuve que Lionsgate avait de l’or en barre entre les mains, KICK-ASS ne dément pas ces arguments. Mieux. Il s’avère au final bien plus que ça.

KickAssPosterDave, ado geek tendance invisible aux yeux des filles décide de revêtir un costume et devenir un super-héros défenseur de la veuve et l’orphelin. Alors que sa popularité grandit sur YouTube, il rencontre Hit Girl, gamine de douze piges dézinguant des mafieux avec son père, Big Daddy.

Disons le tout court : KICK-ASS explose le comic de Mark Millar et John Romita Jr dont il s’inspire. Le film s’étant écrit et tourné en parallèle de la BD et avant même qu’elle ne finisse sa publication (le huitième et dernier volet du premier chapitre n’est sorti qu’en janvier dernier), il lui est à la fois extrêmement fidèle et redoutablement transgressif. Ce qui nous chiffonnait dans le comic (les hésitations de Dave à revenir à son alias après sa longue hospitalisation, les raisons de la vendetta de Big Daddy, entre autres) est soit purement et simplement oublié, soit transformé pour le mieux, soit rapidement expédié via des ellipses salvatrices. Les enjeux dramatiques s’en trouvent radicalement accrus, tout comme les motivations et psychologies des personnages, qui dès lors, prennent réellement corps, sans pour autant oublier l’ironie et la drôlerie décalée qui faisait la force du comic.

KickAssPic1C’est d’ailleurs là que Matthew Vaughn et sa scénariste Jane Goldman font œuvre de la malice la plus appréciable. Ils tirent parfaitement partie des promesses du pitch durant les premières vingt minutes, mettant en scène un univers balisé (la teen comedy) décortiqué avec un humour frondeur frisant la parodie (cf les regards et la démarche débiles de Dave dans les couloirs de son lycée). Cette exposition franchement poilante, se refusant à toute effusion (éjaculation ?) précoce, pose tranquillement les enjeux, rendant foncièrement attachant le personnage principal. Situations ubuesques, dialogues savoureux, libido crasseuse de l’ado en manque de cul, relecture dégénérée du mythe du super-héros : KICK-ASS se joue des codes dont il est issu. Mais pas que. Grâce à cette ouverture toute en légèreté, Vaughn prend le spectateur par l’épaule, gentiment, et le mène sans trop en faire aux autres dimensions du film : le drame poignant et l’actioner dérangeant.

KickAssPic2Passé un ventre mou d’une bonne quinzaine de minutes au bout de trois quarts d’heure de métrage, où le récit, à force de références et de gaudriole, finit par tourner à vide, KICK-ASS passe la seconde. Pour passer de long-métrage pop fendard mais inoffensif à grand film audacieux, puissant, déballant ses tripes sans concession, filant chair de poule et larme à l’œil, accélérant le pouls. Vaughn explore les conséquences des actes perpétrés par ses anti-héros dans le premier acte, et déballe alors une avalanche de violence aussi physique que psychologique et de moments de bravoure stylisés sans être superficiels. Mis en scène avec la rage de l’outsider, illustré par les sublimes thèmes musicaux de John Murphy (originaux, et repris de SUNSHINE ou 28 JOURS PLUS TARD), pétri de scènes impensables par un esprit sain (une gamine tabassée à mort par un mafieux), KICK-ASS prend au col et nous laisse essoufflé, exsangue, choqué et fasciné. Un futur classique, dont la seule existence prouve que l’originalité et les bonnes idées ne sont pas mortes.

Kick-Ass, de Matthew Vaughn. Angleterre/Etats-Unis. 1h57. Avec Aaron Johnson, Nicolas Cage, Chloe Moretz. Sortie le 21 avril 2010.


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