Top 10 cinéma 2010

27-12-2010 - 18:26 - Par

Comme le bêtisier, le top 10 de fin d’année est un peu une tradition à laquelle on ne peut pas couper. Voici donc la liste des films qui, cette année, ont remporté tous nos suffrages.

Emmanuelle Spadacenta

1/ HARRY POTTER ET LES RELIQUES DE LA MORT – PARTIE I

Il ne s’y passe rien et c’est bien là toute l’audace de ce 7e opus. Poème sur l’adolescence d’un romantisme terriblement morbide, imagerie terrifiante du totalitarisme remixée à la sauce magie noire, on est à des lieues de la fable gentillette développée en début de franchise, alors qu’on était loin alors de penser qu’HARRY POTTER serait voué à se radicaliser, visuellement, narrativement et intellectuellement, à ce point.

2/ INCEPTION

Assurément le blockbuster le plus surprenant de l’année. Nolan revisite le labyrinthe des rêves à coups d’innovations visuelles bluffantes et grâce à un scénario de thriller imparable, le tout en prenant très au sérieux son rôle de conteur moderne, au risque de paraître clinique comme un Kubrick. Ce serait ridicule si ce n’était pas maîtrisé de bout en bout. Et c’est pourtant parfait.

3/ THE SOCIAL NETWORK

Comme avec ZODIAC, Fincher s’intéresse plus aux Hommes, à leurs motivations personnelles et profondes, qu’à l’événement. En déplaçant ses pions au gré d’un scénario comme un grand échiquier de la nature humaine, il a décortiqué les coulisses d’une des créations les plus mystérieuses de notre ére 2.0 (Facebook) pour mieux peindre une grande fresque intemporelle sur le génie. Machiavélique.

4/ KICK-ASS

Il y a dans KICK-ASS une poignée de scènes d’anthologie, qui graveront l’Histoire du cinéma du sceau de l’anarchie. Il y a aussi une bonne dose d’humour déplacé et de politiquement incorrect, et un bon paquet d’audace suicidaire, flottant sur une mare de sang. Matthew Vaughn a livré un film qui ne ressemble à aucun autre, bâtard du cinéma bis et du blockbuster de super-héros qu’il est. Peut-être n’a-t-il pas remué le box-office, mais il aura sacrément agité notre année ciné.

5/ TOY STORY 3

C’est l’adieu totalement poignant à l’enfance. D’abord parce que la franchise, qui a révélé au monde la domination de Pixar, est terminée. Ensuite parce qu’on a quasiment assisté à la crémation de nos jouets fictionnels préférés dans une scène qui en aura traumatisé plus d’un. Tragicomédie sur la fin de l’insouciance et magnifique conte initiatique, on a chialé sec devant ce classique instantané.

6/ SCOTT PILGRIM

Inspiré et habité par quelques décennies de pop-culture, SCOTT PILGRIM prône le plaisir immédiat de l’entertainment, osant un récit de jeu vidéo, un graphisme de manga et une histoire d’amour con comme un animé japonais, mais symptomatique d’une génération d’ados attardés. Risqué dans sa narration simplissime et dans sa profusion visuelle, le tout à base d’onomatopées, c’est aussi et surtout un film drôle, frais, et en bien des points inédit.

7/ TOURNÉE

Mathieu Amalric a marié le grand spectacle au drame intimiste : en cela, il aura frappé le cinéma français et le festival de Cannes de son TOURNÉE, mêlant une certaine idée du rêve américain aux villes françaises des bords de mer filmées hors-saison. Impressionnant formellement, mais aussi rigolo et émouvant, son film virevolte dans tous les sens, avec une poésie et une générosité rares. D’une beauté exceptionnelle.

8/ SHUTTER ISLAND

Du cinéma massif, imposant, hégémonique, démontrant que Scorsese n’a pas perdu son goût du mauvais goût, ni sa pertinence en matière de casting, ni même son respect inspiré pour le cinéma classique et les compositions écrasantes. Un peu de Hitchcock par ci, un peu des NERFS À VIF par là, des bons acteurs et des grands décors. Son plus gros succès commercial n’est pas le moins mérité. Du cinéma au sens le plus pur du terme.

9/ BURIED

Exercice de style cinématographique survolé ! En filmant un type enfermé dans une boîte en bois sous le sable du Moyen-Orient en guerre, Rodrigo Cortes prouve qu’on a simplement besoin d’une bonne idée de départ, d’un bon acteur (Ryan Reynolds), d’un contexte politique trouble, d’un téléphone portable et d’un zippo pour faire le triller en huis-clos de l’année. Sadique, radical, primal et d’une tristesse épouvantable : on s’en est toujours pas vraiment remis.

10/ MY JOY

Grosse révélation du dernier festival de Cannes, MY JOY a tout plein de tics de cinéaste poseur prêt à tout pour décrocher une palme, mais avait aussi tout le talent qu’il fallait pour en gagner une. Sous ses airs de film ukrainien chiant et austère, montrant longuement les plaines enneigées, des prostituées sales et les autorités corrompues, le tout via un récit abscons, il est aussi un brûlot enragé et viscéral dont les pays politiquement opaques ont le secret.

Aurélien Allin

1/ INCEPTION

Rare blockbuster à ne rien rebooter ou adapter, INCEPTION apparaissait comme un mystère avant sa sortie, avant de se dévoiler triomphalement en grosse machine hybride, presque hors de son temps, à mi-chemin entre le côté mentalo-bricolo de MEMENTO et la charge héroïco-pyrotechnique de THE DARK KNIGHT. Ou comment remettre le cinéaste et ses idées, même les plus folles, au centre du processus cinématographique. Une déclaration d’intention magistrale et une pure expérience de cinéma.

2/ SCOTT PILGRIM

Le qualifier de « film culte » limiterait le troisième long-métrage d’Edgar Wright à un simple phénomène pour geeks. Car avec ses idées de mise en scène ou de montage folles, son récit volontairement répétitif illustrant à merveille les névroses de son héros, son ambiance aussi rigolarde que mélancolique, et son amour communicatif du cinéma, SCOTT PILGRIM s’affiche surtout comme l’un des films les plus denses, inventifs, hors normes et passionnants de l’année.

3/ TOY STORY 3

L’adage veut que le troisième volet d’une trilogie soit toujours le moins bon. Hommes de défi, les gars de Pixar prouvent le contraire. Avec son récit mené tambour battant, toujours pétri de mille idées par scène, TOY STORY 3 se paie le luxe de livrer l’un des films les plus profonds et poignants de l’année. Le dernier tiers, incroyable d’audace, siphonne le cœur en nous confrontant à la fin de notre enfance, de la façon la plus saine et bouleversante qui soit.

4/ THE SOCIAL NETWORK

Un film sur Facebook ? C’te bonne blague ! Et pourtant. Grâce à un scénario écrit au cordeau par Aaron Sorkin, pour qui le terme « génie » n’est pas galvaudé, l’histoire du réseau social le plus connu au monde se transforme en tragédie grecque. Points de vue multiples et ambigus, personnages aussi détestables que fascinants, sens du cinéma suintant de chaque plan : THE SOCIAL NETWORK prouve après ZODIAC que David Fincher est peut-être le dernier grand cinéaste des années 1970.

5/ ANOTHER YEAR

2h10 de personnages discutant de leur vie. A priori, l’inertie et l’ennui au bout de la séance. Au final, un film bouleversant, d’une justesse et d’une finesse ahurissante. Beaucoup de cinéastes en aurait fait un pensum intello et donneur de leçons. Mike Leigh en tire un long-métrage universel débordant de vie et de sincérité, par la grâce d’une mise en scène impeccable et d’acteurs merveilleux. Injustement boudé à Cannes et enterré en salles avec une date de sortie impossible. Un futur classique.

6/ DRAGONS

On attendait plus grand-chose des films d’animation Dreamworks, trop souvent engoncés dans une recette frimeuse irritante. C’est précisément là que la firme choisit de nous cueillir à froid, et livrer son meilleur film. Pétri de thèmes adultes traités avec soin et sans cynisme sirupeux, DRAGONS fait partie de ces divertissements quasi-parfaits, aux moments de bravoure palpitants, à l’émotion sincère et simple, et aux personnages palpables et attachants. On le dit sans honte : vivement la suite.

7/ TOURNÉE

Il aurait pu briguer mieux que son prix de la mise en scène à Cannes. Avec TOURNÉE, Mathieu Amalric signe non seulement l’un des meilleurs films français depuis des lustres, mais aussi l’un des films les plus libres de l’année. Rarement l’on aura senti le cinéma hexagonal prêt à partager autant avec son public, livrant une chronique exaltante sur la création artistique avec une passion évidente, jamais feinte. Bandant, dans le sens le plus épicurien du terme.

8/ SHUTTER ISLAND

Ou comment un film parvient à mettre sur pellicule l’ambiance et l’imagerie que dégageait un livre lors de la lecture. Avec une minutie clinique, Martin Scorsese déroule un récit passionnant, et une leçon de cinéma comme il n’en avait pas livré depuis CASINO. Bourré de références non vaines, d’idées incroyables, et d’un mauvais goût que seul Scorsese est capable d’assumer avec autant de classe, SHUTTER ISLAND permet en plus à DiCaprio de prouver une bonne fois pour toutes qu’il est l’un des plus grands acteurs au monde.

9/ KICK-ASS

La force de KICK-ASS n’est pas tant de détourner les codes super-héroïques que de s’en saisir pour les pousser jusqu’à leurs limites. Certains y ont vu du quasi poujadisme. En oubliant un peu vite que Matthew Vaughn cherche avant tout à s’amuser, et nous avec, avec un sens du cinéma assez fou et des intentions jusqu’au-boutiste admirables. Sans s’excuser ou se justifier. En prime, le réalisateur anglais parvient à transcender son matériau d’origine, la BD de Mark Millar, qui n’arrive pas à la cheville de son portage au cinéma.

10/ HARRY POTTER ET LES RELIQUES DE LA MORT – PARTIE I

Mine de rien, ce qui avait commencé comme une franchise vouée au succès, s’affirme de plus en plus comme une œuvre de cinéma totalement cohérente, cherchant tout autant à plaire qu’à surprendre, et comme les livres, évoluant avec patience, pour le bien du récit. Avec cet épisode attentiste, sacrifiant l’efficacité sur l’autel du parcours psychologique de ses héros, David Yates signe le mastodonte hollywoodien le plus iconoclaste que l’on ait vu cette année avec INCEPTION, et une montée de sève intenable jusqu’au climax final. On a hâte.

Pub
 
 

Les commentaires sont fermés.