RANGO : chronique

23-03-2011 - 12:42 - Par

Un caméléon, wannabe héros de cinéma, se voit promu shérif d’un patelin du Far West. L’occasion de faire le kéké. Gore Verbinski, lui, y trouve l’opportunité de renouveler l’animation.

Un reptile domestiqué et légèrement barbé par sa vie de patachon en bocal réinvente sa vie lorsque, par accident, il est lourdé au beau milieu du désert américain. Il se forge alors une aura de terreur de l’Ouest et un nom qui tue : Rango. Mais sa réputation de badass est mise à l’épreuve par des rednecks assoiffés, qui l’exhortent à les sortir de la disette. Lui qui s’était imaginé en pirate à la rescousse d’une princesse, qui s’était rêvé en joli cœur, mais est forcé de constater qu’il n’est que malingre, peureux et malheureux, va pouvoir devenir le héros qu’il voulait être.

Ça, c’est le message sympa du film, le bon sentiment qui pourrait faire croire que RANGO est une animation jeunesse, éducative et morale. La blague… Gore Verbinski avait déjà blindé sa trilogie PIRATES DE CARAÏBES de gags pas bien finauds ; là, dédouané du tampon Disney et de ce qu’il engendre en termes de bienséance, le réalisateur ne tarit pas de vannes scatologiques – pour ne pas dire scabreuses – et relève son récit de références cinématographiques et culturelles très adultes quoique parfois régressives. Oscillant entre comédie tsouin-tsouin (et extrêmement drôle, hein) et véritable western des familles, RANGO est raconté comme un grand film d’aventure, tant par son ampleur, ses grands espaces et ses chevauchées sauvages que par le parcours personnel de son héros. Un récit initiatique tour à tour léger et extrêmement émouvant, notamment dans la dernière demi-heure du film, un chef-d’œuvre de cinéma. RANGO regorge de poésie. Il souffle même, dans ces grands décors secs, un grand vent de spiritualité qui exalte l’entertainment et repousse ses frontières vers quelque chose de plus profond et de quasi-expérimental. Verbinski stylise l’imagerie du Far West avec un photoréalisme et une lumière inédits dans l’animation, grâce auxquels chaque carapace de tatou, chaque plume de chouette, chaque écaille de serpent prend une dimension spectaculaire. Le procédé d’anthropomorphisation – un art pourtant difficile – est alors un véritable tour de force. Bien sûr, l’univers est spécial, parfois même dérangeant, mais l’ensemble est d’une beauté à couper le souffle. Embrasant cette splendeur graphique, la musique de Hans Zimmer confère une dimension encore plus grisante au film. Envolées et percussions tonitruantes : de l’énergie galvanisante en barre.

Non négligeable, RANGO a aussi son petit sous-texte écolo, qu’il assène une fois –une seule fois – de manière concrète et évidente, laissant ainsi au spectateur le choix de l’écouter ou pas. La chose à retenir, c’est que Verbinski offre un univers visuel extrêmement solide et un propos terriblement lyrique dans un film comme on n’en a jamais vu avant.

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