BRIGHTON ROCK : chronique

22-06-2011 - 11:45 - Par

S’attaquer à un classique de la littérature, déjà brillamment porté à l’écran, tel est le défi que se lance Rowan Joffe pour son premier film. Une audace payante au final.

Rowan Joffe, scénariste de 28 SEMAINES PLUS TARD, ne commence pas sa carrière de réalisateur discrètement. Non seulement il est le fils de Roland, Palme d’Or avec MISSION en 1986, mais il adapte un roman de Graham Greene, « Le Rocher de Brighton », déjà porté au cinéma en 1947 sous le titre LE GANG DES TUEURS, avec Richard Attenborough. Parlez d’une lourde carte de visite. Qu’il s’en sorte avec les honneurs, sans chercher à faire ses preuves avec insistance, s’avère donc un véritable tour de force. D’autant que BRIGHTON ROCK recèle suffisamment d’obstacles pour faire trébucher le plus chevronné des cinéastes. Pinkie, jeune membre d’un gang de mafieux, prend les rênes de sa bande après l’assassinat de son mentor. Par vengeance, il tue un rival, mais découvre qu’une serveuse, Rose, peut prouver sa culpabilité. Pour la faire taire, il la séduit. Imagerie du polar noir usée jusqu’à la corde, héros détestable, héroïne naïve : casse-gueule, on vous dit. Rajoutons frustration sexuelle et chape de plomb religieuse à ce cocktail instable, et on comprend aisément à quel point BRIGHTON ROCK aurait pu être douloureux à supporter. Certes, Joffe n’évite pas les maladresses : le récit souffre de longueurs, voire d’un délitement hasardeux des enjeux en cours de route. Mais il possède aussi d’excellentes idées, comme situer BRIGHTON ROCK dans les années 60 – le roman et le premier film se déroulaient dans les années 30 –, époque qui forme un cadre idéal au récit. Pinkie et ses collègues semblent se débattre à contre-courant d’une révolution sexuelle et culturelle qui fait d’eux des anachronismes ambulants. Leur disparition annoncée donne au long-métrage une ambiance crépusculaire absolument étouffante, voire terrifiante. Comme si BRIGHTON ROCK chroniquait la fin d’un monde et la naissance d’un nouveau, encore plus dénué de tout repère moral. Et puis, splendide visuellement (certaines scènes semblent tournées en un Technicolor très 60’s), BRIGHTON ROCK convainc aussi grâce à ses acteurs, et surtout Andrea Riseborough, parfaite en victime idéale. Le parcours de son personnage, Rose, se conclut avec une cruauté opératique bouleversante, qui permet au film d’imprégner longtemps la mémoire du spectateur. Pour un premier essai, on ne saurait faire meilleur compliment.

De Rowan Joffe. Avec Sam Riley, Andrea Riseborough, Helen Mirren. Sortie le 22 juin

Pub
 
 

Les commentaires sont fermés.