HOP : Michael Gregorio en entretien

05-07-2011 - 19:35 - Par

À l’occasion de la sortie au cinéma de HOP et en DVD de GNOMEO ET JULIETTE, Cinemateaser a taillé le bout de gras avec Michael Gregorio.


Il fait parfaitement la guitare électrique. Imite à merveille Joe Cocker, Julien Doré ou Jean-Jacques Goldman. Est souvent à la télé pour promouvoir ses spectacles, se jouant à guichet fermé. Et depuis peu, Michael Gregorio prête sa voix aux versions françaises de divers films. D’une part, GNOMEO ET JULIETTE, revisite de la pièce de Shakespeare chez les nains de jardins. Et ce mois-ci au cinéma, il est dans HOP, la voix de… Hop, préposé lapin de Pâques en pleine rébellion adolescente, voulant vivre une vie de batteur en Californie et se retrouvant dépendant d’un type plutôt irresponsable et rêveur (James Marsden). Par ces deux longs-métrages (le premier est un dessin-animé, le deuxième un mélange d’animation et de live-action « à la » ALVIN ET LES CHIPMUNKS), l’imitateur-humoriste-chanteur s’adresse ainsi à des publics familiaux. Il s’était déjà essayé à la VF de THE KIDS ARE ALL RIGHT, mais personne n’avait vraiment noté. Alors discutons doublage et cibles marketing avec Gregorio, les pieds sur terre et le parler franc.

La VF au cinéma est très dénigrée par les cinéphiles et la presse. Faire partie d’un doublage, trouvez-vous cela anti-cinéphile ?
Non, parce qu’en France, on a de la chance, on est plutôt bon. Il y a même parfois des VF qui sont meilleures que des versions originales. Ça dépend du soin qu’on y apporte. Naturellement, je vais voir en priorité des films en VO sans vouloir paraître snob. En même temps, dans l’animation, parce qu’il y a tout un tas de private jokes, je trouve cela très bien qu’on les double. En France, on est connu dans le monde entier pour faire des versions de qualité, et pour nos directeurs de plateau, nos adaptateurs…

C’est sûr que si vous comparez à certains pays où l’on entend encore les voix originales derrière…
Voilà ! Même au-delà, tout le travail de réécriture… J’ai bossé sur THE KIDS ARE ALL RIGHT et on ne s’imagine pas tout le travail qu’il y a derrière, d’adaptation des références, notamment. Pour avoir entendu d’autres versions étrangères, on se rend compte qu’on n’est pas si mauvais que ça. Ça dépend aussi des moyens, du temps qu’on donne aux comédiens, au directeur de plateau.

Le doublage est réputé pour être un monde très particulier, une vraie corporation. Fréquentez-vous ce milieu ?
Non, non… J’ai croisé un tas de professionnels au fil de mes expériences mais je tiens à dire que ce sont d’abord de vrais comédiens. C’est important de le signifier. Je discutais avec Vanina Pradier qui m’a dirigé sur GNOMEO ET JULIETTE, elle me racontait que parfois, des chanteurs, des gens comme moi finalement, venaient faire des sittings devant les studios de Dubbing Brothers à La Plaine St Denis. Ils voulaient juste faire des essais. Mais parfois, ils se rendent compte qu’ils sont incapables de faire ce métier car ils ne sont pas comédiens. Il faut d’abord être acteur, et puis après seulement maîtriser la technique.

Vous dîtes qu’il y a des voix qui ne sont pas faites pour le doublage. En l’occurrence, vous avez une véritable voix, qui fait votre célébrité. Est-ce que le doublage, c’est un plan B pour vous, qui n’êtes jamais devenu acteur ?
Non, pas du tout. Ce n’est pas un plan B, c’est un « plan + ». Je vais faire un p’tit historique. Je n’ai jamais vraiment voulu être imitateur. Au lycée, j’avais deux passions : le théâtre et la musique. J’ai découvert que je pouvais m’amuser avec ma voix, au théâtre, et grâce à mes groupes de rock. Pour faire marrer les potes, je chantais en imitant Thom Yorke ou Kurt Cobain. Au théâtre, dès que j’avais un personnage, je m’amusais à le construire jusqu’à lui créer une voix. Parfois, on me donnait des rôles âgés et je m’amusais à la rendre bien plus mûre alors que j’ai une voix plutôt très juvénile. Au final, quand on m’a proposé le doublage, c’était un peu un retour à mes premières amours. Je ne me vendrai jamais comme un comédien, j’en ai ni l’expérience ni la technique ni la formation. Mais il y a quand même des choses cousines, comme la sensibilité. Après, il faut être dirigé, accepter d’écouter les gens dont c’est le métier.

Et c’est un problème ?
Ah non, au contraire. Justement, c’est tout l’inverse du spectacle. Sur scène, c’est moi le patron, je dirige tout le monde… Très gentiment, hein ! Là, le travail de comédien, c’est se mettre au service de la volonté du directeur de plateau, servir le film et pas soi même.

Mais vous devez bien avoir quelque ambition de comédien. Votre spectacle, ce n’est pas que du chant, c’est de la représentation surtout…
Oui…

Il y a donc forcément une volonté de se mettre en scène, d’être acteur…
Bien sûr. Mais ce n’est pas une ambition…

Ce n’est pas sale d’avoir de l’ambition !
Ah non, bien sûr, ce n’est pas moi qui vais vous dire le contraire ! Mais non, je n’ai pas cette ambition là. La seule envie (je préfère ce mot) que j’ai, c’est d’avoir des expériences très différentes. J’ai adoré être de la tournée « Autour de la guitare » avec plein de guitaristes comme Jean-Félix Lalanne. J’ai adoré faire HOP, GNOMEO ET JULIETTE, THE KIDS ARE ALL RIGHT, un autre projet pour les 25 ans de l’association AIDES. Ce sont des expériences différentes, mais elles sont complémentaires. Je me sens plus riche. Je n’ai pas l’ambition de devenir acteur ou chanteur ou musicien ou imitateur ou humoriste. J’ai envie de faire des choses différentes. J’ignore si cela vient du fait que je me suis installé pendant deux mois au Bataclan, mais j’étais assez complexé sur le côté comédien, justement, que j’avais refoulé, alors qu’au départ c’est ce que je voulais vraiment faire. Je ne sais pas si c’est le Bataclan ou GNOMEO ET JULIETTE, mais dans le spectacle, dans les inters, quand je parle aux gens, ces moments ont pris une autre dimension. Je les aime maintenant, alors que je les appréhendais. Ce sont des moments de liberté, que j’attends. Je laisse plus de place à l’improvisation. Désormais, j’assume.

Est-ce que vous pensez que si vous étiez un humoriste « méchant », vous auriez été appelé à être la vitrine d’un film comme HOP ?
Non, forcément. En revanche, il y a tout de même dans le spectacle des moments irrévérencieux bien que jamais gratuits.

Mais ça reste gentil par rapport à d’autres imitateurs.
Oui, ce n’est pas violent… Mais mon sketch sur Christophe Maé m’attire pas mal de lettres d’insultes de la part de ses fans…

Avez-vous l’impression d’être un argument marketing quand vous prêtez votre voix à des films d’animation ?
Déjà, je suis surpris car je n’ai pas l’impression d’avoir une grande notoriété. Je ne suis pas Gad Elmaleh… Je me dis « qu’est-ce que je vais apporter au film ? » Je parle juste de la notoriété, même pas de prestation. Je me suis posé la question très honnêtement. D’ailleurs, je ne suis pas sur les affiches. En fait, je n’en ai aucune idée. Il y a des enfants qui viennent à mes spectacles, même s’ils ne saisissent pas toutes les références. J’ai aussi des personnes âgées dans le public. Moi qui pensais avoir une cible de 25-35 ans… Surprise : y a toute la famille. Pourtant, je n’ai pas l’impression d’être si populaire.

Vous ne vous en rendez pas compte.
Peut-être. Cela a été progressif. Je ne suis pas surexposé médiatiquement, j’ai juste l’impression de faire mon travail. Depuis ma première télé, qui remonte à plus de dix ans, tout a été doucement. Et c’est tant mieux.

Mais que vous ne soyez pas surexposé ne veut pas dire que vous n’êtes pas très populaire. Justement, cela permet aux gens de ne pas saturer. Personnellement, je trouve cela intéressant que vous fassiez de la promo pour ces deux films. Du coup je me demande comment vous vivez artistiquement…
… d’être un produit marketing ?

Ce n’est pas méchant, hein…
Oh non, au contraire, je n’ai aucun problème avec ça, je trouve ça intéressant d’avoir cette discussion. Je préfère très honnêtement être avec vous aujourd’hui pour parler de HOP ou de GNOMEO ET JULIETTE que de passer une journée complète à La Plaine St Denis pour aller faire un medley sur un plateau télé.

Ce qu’on fait là, aujourd’hui, vous paraît plus cohérent avec ce que vous êtes ?
En tout cas, sur des émissions de variété, je me sens moins à l’aise parce que j’ai l’impression de rentrer chez les gens. Je suis timide et réservé, ce qui peut paraître bizarre parce que dans mon spectacle, je peux paraître exubérant, mais c’est un cadre particulier. Dès qu’il y a une caméra, c’est plus pareil. Je préfère avoir cette discussion, plutôt que d’être sur un plateau où tout va vite, où il faut être performant immédiatement. Sur scène, j’ai 1h45 pour m’exprimer. Donc je suis tranquille, je suis chez moi, c’est moi qui invite. En télé, je rentre chez vous, l’espace de 2mn30…

Quel genre de cinéphile êtes-vous ?
Cette année, j’ai adoré INCENDIES. J’avais vu la pièce et en revoyant le film, j’ai ressenti l’univers de l’auteur, même s’il ne l’a pas réalisé. Les comédiens sont fantastiques. Pour moi c’est le film de l’année. J’ai aussi vu ESSENTIAL KILLING, que j’ai beaucoup aimé.

Vous êtes donc très film d’auteur…
Oui, mais j’aime un peu de tout. J’ai adoré TOY STORY 3.

Vous allez en salles ou vous êtes consommateur de DVD ?
Les deux. J’aime aller en salles, mais aujourd’hui, les box rendent vraiment tout plus facile. Mais j’aime la démarche d’aller au cinéma.

Mais quels sont les films qui vous ont construits en tant que cinéphile ?
AMERICAN HISTORY X, que j’ai vu ado. Après ce film, Edward Norton est devenu mon acteur préféré. Plus jeune encore, il y avait LA LISTE DE SCHINDLER. J’adorais aussi les comédies de De Funès qui passaient le mardi à la télé… Et qui repassent toujours d’ailleurs ! (rires) Je me souviens aussi être allé voir, ado, les films de Jaoui et Bacri, comme LE GOÛT DES AUTRES, que j’avais vu dans un cinéma itinérant dans ma petite ville. Bien sûr, personne n’avait aimé parce que tout le monde voulait voir les gros machins…

Vous n’êtes pas « gros machin » ?
Si ! J’ai aimé les PIRATES DES CARAÏBES. Les HARRY POTTER, aussi. Ce sont d’excellents divertissements, avec des clés qui fonctionnent. Et puis, dans un autre style, j’ai raté PINA et NORWEGIAN WOOD, récemment… Je n’avais vraiment pas le temps.

HOP, de Tim Hill. Sortie le 6 juillet au cinéma

GNOMEO ET JULIETTE, de Kelly Asbury. Disponible en DVD et en Blu-ray

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