THE MURDERER : chronique

20-07-2011 - 07:01 - Par

Après avoir inauguré sa carrière avec THE CHASER, Na Hong-jin lâche la pression dans un polar à bout de souffle.


Cadet des prodiges sud-coréens, Na Hong-jin présentait en 2008 à Cannes son tout premier film, THE CHASER, noir et sanglant, dans lequel un ex-flic devenu proxénète prenait en chasse le kidnappeur d’une pute. Un choc visuel comme on en subit rarement et même Hollywood ne put y couper. La Fox décida ainsi d’octroyer au réalisateur un paquet de dollars pour son deuxième long. Voilà donc THE MURDERER, polar encore plus ambitieux, mais exécuté sans aucun compromis. Sur fond de détresse sociale, l’histoire nous plonge dans la province de Yanbian, entre la Corée du Nord et la Russie, où Gu-nam tente de gagner sa vie pour rejoindre, à Séoul, sa femme dont il est sans nouvelle. Myun, un malfrat local, peut faire accélérer les choses : il lui promet une très grosse somme s’il assassine une cible. Or notre tueur à gages de fortune n’est pas seul sur le coup. L’engrenage de violence s’annonce terrible. Que Na Hong-jin trimbale sa caméra dans des contrées désœuvrées, au rythme des aboiements des chiens et des jurons des hommes, ou qu’il filme les cales des chalutiers et les bas-fonds des villes avec un grain crasseux, THE MURDERER est un tableau d’un tel fracas sonore, d’une tristesse si sublime, qu’on est immédiatement fasciné. Sous nos yeux, Gu-nam slalome dans cet enfer puant, accablé par sa propre solitude, poussé par son instinct de survie, pourchassé par des monstres, dans un drame bouleversant aux accents de thriller mainstream. Na Hong-jin retrouve ici Ha Jung-woo et Kim Yun-seok, les têtes d’affiche de THE CHASER, inverse leur rôle de bourreau et de victime (bien que tout ne soit pas si manichéen) et leur offre deux personnages puissants, dont la détermination se dissout dans la rage ou dans le désespoir. D’où quelques scènes d’une virtuosité inouïe. On pense notamment à une course poursuite à pied qui force l’admiration et dont on ressort littéralement essoufflé. Mais bien des scènes manifestent du talent d’esthète du cinéaste, qui sait autant filmer les entrelacs de carcasses de bagnoles que chorégraphier des tueries sanguinaires. De la complaisance dans le chaos ? Peut-être dans le récit, complexe à l’excès. Mais disons plutôt que Na Hong-jin assume son goût prononcé du baroque suintant de l’hyperréalisme ambiant. Incroyable.

De Na Hong-jin. Avec Ha Jung-woo, Kim Yun-seok, Cho Seong-ha. Corée du Sud, 2h20. Sortie le 13 juillet

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