POULET AUX PRUNES : chronique

26-10-2011 - 11:08 - Par

Après « PERSEPOLIS », Marjane Satrapi adapte au cinéma une autre de ses bandes dessinées. En prises de vue réelles et avec une inventivité éblouissante.

Téhéran, 1958. Nasser Ali Khan, l’un des plus grands musiciens de son temps, est lassé de tout. De l’existence, plus particulièrement. Son cœur a été brisé en même tant que son estimé violon et, depuis, il erre sans but. Ou raison d’espérer. Il décide alors de mourir. Comment ? En ne rien faisant. Nasser se met au lit et attend. Tandis que les jours s’égrènent, il s’affaiblit et entre dans une transe qui le conduit à revivre une partie de sa jeunesse, entrevoir le devenir de ses enfants, discuter avec l’Ange de la mort et, surtout, pleurer la perte d’un amour passé. Quatre ans après le sublime PERSEPOLIS, Marjane Satrapi adapte de nouveau l’une de ses propres bandes dessinées – « Poulet aux prunes », Prix du meilleur album 2005 au Festival d’Angoulême – et convoque, derechef, son collègue et ami Vincent Paronnaud (déjà de PERSEPOLIS) pour l’aider au scénario et à la réalisation. Sauf que, cette fois, il ne s’agit pas d’un long-métrage d’animation, mais d’un film en prises de vue réelles. Ce qui, attention, ne signifie aucunement « réaliste »… Malgré la présence de (très bons) comédiens faits de chair et de sang, le parti-pris esthétique renvoie d’abord à la lecture d’un roman graphique. Et la composition des plans, le choix des décors et les idées de mise en scène flirtent plus avec le 9e que le 7e art. Ce n’est pas un mal, sachant que POULET AUX PRUNES est une transposition fidèle – à l’exception de menus détails – de son matériau source. À la limite, seul le rythme de l’histoire diffère, langage cinématographique oblige. Dans la BD, ellipses, flashbacks et flashforwards se succédaient de manière nette, voire abrupte. À l’écran, le récit ralentit et revêt un caractère protéiforme –mélo, sitcom, film fantastique–  pour éviter que le public ne perde le fil d’une intrigue volontairement décousue. Une variation stylistique induit ainsi une rupture narrative. C’est bien amené, mais la richesse de ce patchwork visuel empêche de se laisser aller. Le spectateur contemple la toile sans pourtant être aspiré par le tourbillon émotionnel attendu. En revanche, on ressort de la salle avec une folle envie : déguster le plat préféré de Nasser Ali Khan… un poulet aux prunes.

De Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud. Avec Mathieu Amalric, Jamel Debbouze, Edouard Baer. Sortie le 26 octobre

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