LES IMMORTELS : chronique

17-11-2011 - 16:49 - Par

Le troisième film de Tarsem Singh, LES IMMORTELS, est son meilleur long-métrage. Sans le qualifier de chef-d’œuvre, disons qu’il se révèle « divinement » bon.

La Grèce. Quelques milliers d’années avant Papandréou. Depuis que le roi Hypérion (Mickey Rourke) caresse l’idée aussi sotte que grenue de libérer les Titans emprisonnés sous le mont Tartare, il tue tout ce qui bouge et vole tout ce qu’il peut dans l’espoir de mettre la main sur un arc légendaire susceptible de l’aider dans sa triste quête. Un vendredi 12 à midi, il débarque dans un village à flanc de falaise, attaque la populace et tranche la gorge d’une gente dame qui n’avait rien demandé. Pas cool. Sous les yeux de son fils, Thésée (Henry Cavill). Pas glop. Ce dernier, aussi énervé que réactif, joue aussitôt des poings et élimine plusieurs figurants peinturlurés avec style. Cependant, il ne parvient pas à atteindre le boss de fin de niveau et doit donc ronger son frein. En même temps, le film dure encore une heure et demie… il fallait s’y préparer ! Capturé, Thésée fait alors la connaissance de Phèdre (Freida Pinto), un oracle qui, très vite, va se transformer en une groupie antique de notre musculeux héros. Elle a vu que Thésée allait accomplir de grandes choses. Elle a vu que Thésée était beau. Elle y a vu son intérêt. Bon, ça traîne… Mode « 88 miles à l’heure » enclenché : avec l’aide de Stavros (Stephen Dorff), ils s’échappent et coursent Hypérion ; Hypérion envoie le Minotaure ; le Minotaure est grand et moche ; moche est un adjectif qui ne s’applique pas aux dieux de l’Olympe ; l’Olympe, c’est-à-dire le kop où se réunissent les supporters les plus puissants de Thésée, à commencer par Zeus (Luke Evans) ; Zeus qui veille au grain, descend sur Terre et zieute avec anxiété le mont Tartare ; Tar…Tarsem a fait du bon boulot avec LES IMMORTELS.

En réalité, c’est tout bête. Mister Singh a enfin réussi là où il avait échoué par deux fois auparavant : tenir/conduire jusqu’au bout son récit, aussi foutraque et conventionnel soit-il ici. Dans THE CELL et THE FALL, le réalisateur s’était laissé aller à trop de considérations esthétiques au point d’oublier parfois qu’un film vaut plus qu’un long clip vidéo aux allures de patchwork artistique. Avec LES IMMORTELS, il se montre désormais capable de bâtir une structure narrative solide. Emprunter, ici et là, à la mythologie (ouille, les puristes) et sortir avant LE CHOC DES TITANS 2 – dont le pitch, fondé sur la Titanomachie, est quasi similaire – a du bon… Attention ! Ce n’est pas pour autant que l’on courra voir un Tarsem comme on se ruera sur le nouveau Abrams ou Fincher. Le metteur en scène indien ne s’est pas transformé en auteur du jour au lendemain et il reste, avant tout, un plasticien. Si sa créativité s’épanouit aujourd’hui au sein d’un scénario envisagé en tant que cadre normatif, elle affleure et s’exprime au travers de préceptes formels et de tentatives visuelles. Avec plus ou moins de bonheur. Plus ? La richesse des plans qui rappellent la théâtralité des toiles de Caravage. Moins ? Certaines créations de la costumière Eiko Ishioka, dont on ne sait si elles bousculent les conventions ou frisent le ridicule. On a bien entendu quelques rires dans la salle… En ce qui nous concerne, nos gloussements sont allés tout entier aux Titans, passablement ratés. Sortes de créatures véloces à tendance SM que l’on penserait issues du cerveau malade de Carl Stagher, le tueur en série de THE CELL… Bof. En revanche, les dieux de l’Olympe se révèlent vraiment réussis. Ce n’est pas tant les acteurs – Luke Evans est excellent, Henry Cavill assure dans son premier grand rôle – ou leur look qui nous ont tapé dans l’œil, mais le concept même de déité imaginé par Singh. Le fait qu’ils soient proactifs, faillibles et finalement très humains. Chacune de leur apparition intrigue, enthousiasme et hisse le film vers le haut. Dommage qu’elles ne soient pas plus nombreuses. Cela aurait été (im)mortel !

De Tarsem Singh. Avec Henry Cavill, Luke Evans, Mickey Rourke. 1h50. Sortie le 23 novembre

Note de la rédaction : 3 sur 5

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