MISS BALA : chronique

02-05-2012 - 10:53 - Par

Gerardo Naranjo s’ajoute à la liste des cinéastes mexicains à suivre de près grâce à ce thriller à forte dimension humaine. Un vrai coup de poing dans le bide.

Laura (Stephanie Sigman), jeune Mexicaine espérant briller à un concours de beauté, est témoin d’un règlement de comptes impliquant des narcotrafiquants. Kidnappée par leur leader, Lino (Noe Hernandez), elle se voit forcée d’effectuer des missions périlleuses pour les criminels. Avec MISS BALA, Gerardo Naranjo entendait poser un regard réaliste sur son pays, le Mexique, qu’il estime gangréné par « la peur, l’ignorance et la violence ». Et réaliste, son regard l’est, au point de faire de MISS BALA un summum du thriller anxiogène, durant lequel il est difficile de reprendre son souffle. Non pas que Naranjo nous présente ici un grand-huit à l’américaine, où le contexte serait le prétexte à des scènes d’action pétaradantes – même s’il en affiche quelques-unes particulièrement impressionnantes. Mais le cinéaste, en se souciant avec précision du hors-champ et en calant son regard sur Laura, évite de tourner la violence en objet graphico- glamour, et préfère en analyser les conséquences. Ce point de vue à la première personne accentue de fait l’identification du spectateur et donne à MISS BALA une énergie folle. Une tension étouffante dont, comme Laura, nous sommes totalement prisonniers. Cette empathie ressentie jusque dans les tripes devient alors le moteur d’un suspense sans putasserie. Mieux, Naranjo, malin comme un singe, ne distille aucun espoir manipulateur. Si l’on aimerait exhorter Laura à tenter l’impossible, à se libérer de ses geôliers, le cinéaste refuse tout héroïsme et choisit de rendre palpable l’impuissance de son personnage. MISS BALA ne sombre pas pour autant dans le manichéisme. Au fil du récit, alors que Lino révèle sa part humaine, le cinéaste déploie avec tact une certaine ambiguïté, où les rapports entre victime et bourreau se font plus complexes, où la frontière entre Bien et Mal se fait toujours plus mince. Ici, tout le monde est fautif, au final. Si bien que Naranjo se paie le luxe de quelques grands moments d’humour noir, notamment lors des scènes de concours de beauté, dont l’hypocrisie et la naïveté kitschouille en disent long sur les rêves vains – célébrité, richesse – ou la corruption qui spolient les Mexicains. Un portrait sans compromis, sombre mais nuancé, qui érige MISS BALA en film choc. Pour une fois que le terme n’est pas galvaudé…

De Gerardo Naranjo. Avec Stephanie Sigman, Noe Hernandez, James Russo. Mexique. 1h53. Sortie le 2 mai

Note de la rédaction : 4/5

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