L’OMBRE DU MAL : chronique

20-06-2012 - 09:51 - Par

Un digest des œuvres d’Edgar Allan Poe sous un angle particulièrement morbide.

Des conditions de la mort du poète Edgar Allan Poe, on ne sait quasiment rien et les théories fleurissent. Celle de James McTeigue ? Imaginer que l’auteur maudit a aidé à débusquer un tueur en série inspiré par les histoires terribles qu’il avait lui-même couchées sur papier. Faire de grandes personnalités des héros de thrillers complexes, ce pourrait être la tendance imminente d’un cinéma qui aime à dynamiter les clichés. Conan Doyle et Houdini sont les prochains fins limiers d’Hollywood. Et s’ils subissent le même dépoussiérage que Poe, alors il y a espoir que l’industrie n’ait pas perdu toute imagination. Devant la caméra du metteur en scène de V POUR VENDETTA et sous les traits de John Cusack, l’écrivain de « Double assassinat dans la rue Morgue » a tout d’une star d’un cinéma diablement moderne. Malgré les costumes de feutrine, les grandes robes, l’éclairage à la bougie et les rotatives archaïques, L’OMBRE DU MAL revendique une énergie moderne, un postulat tordu, quoiqu’assez pertinent, et des crimes machiavéliques. Ceux-là même que Poe a imaginés, aviné ou pas, loin de penser que quiconque serait assez pervers pour les reconstituer. D’autant que, souffrant d’un certain manque de notoriété sur le sol américain, Poe doutait de son influence. C’est alors la responsabilité des écrivains, la portée des écrits, la fonction de la fiction, qui sont décortiquées là. Un auteur criminel s’inspire-t-il de la monstruosité de la condition humaine ou, au contraire, la nourrit-il ? Un débat ancestral, mais souvent survolé, traité de manière totalement divertissante. Sans plus ? Sans plus. Malgré une magnifique esthétique gothique et romantique – que l’on doit au génie visuel de McTeigue –, L’OMBRE DU MAL est un petit film, dont les ambitions dépassent largement le récit linéaire voire monotone, et dont le postulat de départ surclasse les péripéties prévisibles. Son ambiance morbide, lorgnant vers les codes du cauchemar, ne suffit jamais à transcender le manque de surprise, à quelques seuls soubresauts près (notamment lors des scènes de supplices très anxiogènes). Et Poe/Cusack mis à part, le potentiel des personnages secondaires et le talent de leurs acteurs (Luke Evans, Oliver Jackson Cohen, Alice Eve) sont sous-exploités. Finalement ne subsiste qu’une imagerie forte de la perversion en adéquation parfaite avec son sujet.

De James McTeigue. Avec John Cusack, Alice Eve, Luke Evans. États-Unis. 1h51. Sortie le 20 juin

Note de la rédaction : 3/5

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