RAMPART : chronique

03-07-2013 - 09:05 - Par

Après THE MESSENGER, le réalisateur Oren Moverman retrouve Woody Harrelson pour un film à l’âpreté féroce.

On connaît le scandale « Rampart » et les enquêtes dont fut l’objet le commissariat de Los Angeles du même nom gangréné par la corruption et les abus de pouvoir. Le film d’Oren Moverman n’a aucune vocation réelle à revenir dessus. Il tend simplement à décrire les dérives d’un flic qui, fort de son badge et de son arme, développe un sentiment de toute-puissance. Woody Harrelson incarne Dave Brown, violent, misogyne, raciste, queutard et abusif, un agent sali comme la population redoute d’en croiser la nuit. D’exactions en bavures, il va devenir un vrai problème pour sa hiérarchie, qui rechigne de plus en plus à le couvrir. Après des années de service, il est devenu un chien fou, incontrôlable, délirant. La gueule plus que jamais patibulaire, Harrelson livre une prestation absolument remarquable dans ce rôle difficile, suscitant autant d’antipathie que de fascination. Car l’étude de personnage est sans appel : fouillée, complexe, exhaustive, elle ne laisse aucune place au salut et étouffe littéralement le récit sous la perversion et l’aigreur. Moverman avait déjà signé un excellent constat social avec THE MESSENGER, dans lequel Harrelson (déjà) et Ben Foster campaient deux soldats en charge d’annoncer aux familles le décès d’un des leurs en zone de combat. Un métier morbide, qui dévorait tout sur son passage et qui transformait en profondeur ceux qui l’exerçaient. Dans les deux films, il s’agit de regarder de près les sacrifices que requiert de servir son pays et, dans RAMPART plus particulièrement, la manière dont ils dégénèrent. L’Amérique est- elle ingrate ? Est-elle capable de contrôler la colère de ses citoyens ? Envoie-t-elle son peuple au casse-pipe sans anticiper les conséquences ? Autant de questions sans réponses, mais jetées en creux à la face du spectateur, un peu décontenancé par le portrait noir qu’on lui dresse de ce Dave Brown. La narration n’est pas des plus accessibles et verse dans l’errance, se traduisant à l’image par un abus de longue focale, de flares et de plans à l’épaule. Mais une tendance radicale à cramer les couleurs nous rappelle sans cesse à ce Los Angeles sulfureux qui échauffe les esprits, cette étuve surpeuplée. Avant, l’étude sans concession de la corruption policière moderne avait THE SHIELD, notamment. Aujourd’hui, elle a RAMPART, plus fauché et moins ludique, mais tout aussi édifiant.

D’Oren Moverman. Avec Woody Harrelson, Sigourney Weaver, Steve Buscemi. États-Unis. 1h47. Sortie le 3 juillet

 

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