THE EAST : chronique

10-07-2013 - 08:37 - Par

Une plongée effrayante et anxiogène au cœur d’un groupuscule éco-terroriste, par le nouveau duo de choc du cinéma US indé.

Il y a deux ans, Zal Batmanglij (coscénariste / coproducteur / réalisateur) et Brit Marling (coscénariste / coproductrice / interprète) se faisaient un nom dans le cinéma indépendant américain avec SOUND OF MY VOICE, thriller feutré et fauché dans lequel des documentaristes tentaient de faire tomber la mystérieuse gourou d’une secte. Aujourd’hui, le duo – prometteur – se reforme pour le formidable THE EAST (produit par Ridley et feu Tony Scott) avec la même vocation d’immersion dans un milieu secret et hors la loi. Cette fois, c’est une ex agent du FBI (et désormais employée d’une agence de renseignement privé) qui va infiltrer, sur la demande de gros clients en col blanc, un groupe d’éco activistes qui menacent leur image et leurs bénéfices. Elle va y faire la connaissance de jeunes gens enragés (Alexander Skarsgård, Ellen Page, Toby Kebbell…), traquant les exactions ordinaires de grandes industries – pharmaceutiques ou autres – et cherchant à infliger aux responsables les sévices écologiques ou sanitaires qu’eux-mêmes font subir à la population sans jamais être épinglés par les autorités compétentes. Du terrorisme pour punir des terroristes, œil pour œil et dent pour dent, sans autre forme de procès. Leur engagement balaie un large spectre de motivations : les uns succombent au « vigilantisme », d’autres versent dans l’anarchie. Quand il est question de faire justice, ils n’ont plus de patrie, plus de famille, plus d’amis. Leur idéologie, bien que radicale et condamnable, va doucement ébranler les certitudes de l’infiltrée, tiraillée entre la corruption d’un système et l’ultraviolence d’une pensée intègre. THE EAST soulève bien des questions éthiques et politiques et interroge notamment le pouvoir de séduction de l’extrémisme et la notion de criminalité. Est-elle plus ou moins répréhensible selon qu’elle est dissimulée ou clairement revendiquée ? Aucune réponse n’est évidemment apportée par Zal Batmanglij. Désirant créer le dilemme chez son héroïne – et chez le spectateur a fortiori –, il préfère au lourd pensum l’efficacité de la pure fiction. Une décision salutaire, car même s’il est doté d’une dimension romantique un peu superflue et d’une fin un poil tirée par les cheveux, THE EAST est un vrai thriller jusque dans son storytelling haletant, sa caméra urgente, ses enjeux graves et ses personnages troubles. C’est surtout un petit film sur les nerfs, sévère et socialement conscient, qui n’excuse rien ni personne.

De Zal Batmanglij. Avec Brit Marling, Alexander Skarsgård, Ellen Page. États-Unis. 1h56. Sortie le 10 juillet

 

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