LONE RANGER : chronique

07-08-2013 - 08:46 - Par

En dépit de toute l’application de Gore Verbinski et de quelques moments fugaces de magie, la sauce LONE RANGER ne prend jamais vraiment.

San Francisco, 1933 : à une fête foraine, un enfant rencontre un vieux Comanche, le légendaire Tonto (Johnny Depp), qui va lui conter son prestigieux passé. Ou comment, en 1869, alors que le Far West allait enfin être relié au reste des États-Unis grâce au chemin de fer, il a fait équipe avec le Ranger solitaire (Armie Hammer). Un héros masqué et revenu d’entre les morts, bien décidé à punir un gang de hors-la-loi sanguinaires. L’introduction de LONE RANGER s’avère gorgée de promesses. En mettant dos à dos notre époque post Révolution industrielle et le passé révolu du Grand Ouest, en présentant Tonto via le regard d’un jeune garçon émerveillé, en ancrant le récit dans le pouvoir de l’oralité, Gore Verbinski insuffle à son film une double ambition. La première, enchanteresse, compte plonger le spectateur dans un état de fascination enfantine. La seconde, bien plus sombre, souhaite réfléchir avec une ironie sardonique et une virulence surprenante pour un blockbuster Disney sur les fondements moraux des États- Unis et sur la place du peuple indien dans l’Histoire. Pourrait-on tenir là une grosse machine alliant parfaitement conscience et divertissement décomplexé ? Malheureusement, non. Car Gore Verbinski, malgré toute son application esthétique (photographie spendide, mise en scène bien pensée) et la certaine malice du scénario (éclatement narratif, relecture fantasmée du réel) ne parvient jamais à atteindre le juste équilibre. On ne peut qu’admirer la dureté du propos sous-jacent, qui explore les fondations des États-Unis – comment, selon le film, ils se sont construits sur la cupidité, le racisme, le sang et une course au progrès destructrice – et qui analyse également ses névroses actuelles (« Les armes ne sont pas les bienvenues dans le futur », lance l’utopique héros). Mais tout ce pan de LONE RANGER – qui semble constituer l’inspiration première du cinéaste et renvoyer à son superbe RANGO dans sa manière d’user des codes du western pour les pirater – se trouve vite cannibalisé par un spectacle chaotique. Trop étiré et prévisible, le récit passionne guère. Inégal et bouffon, l’humour tombe souvent à plat. Même les personnages, en dépit de quelques rares étincelles et d’une interprétation concernée, peinent à créer le moindre investissement émotionnel chez le spectateur. Et LONE RANGER de n’être au final qu’un grand huit bruyant dont les intentions louables et audacieuses ne parviennent jamais à émerger franchement.

De Gore Verbinski. Avec Johnny Depp, Armie Hammer, William Fichtner. États-Unis. 2h30. Sortie le 7 août

 

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