Toronto 2013 : DALLAS BUYERS CLUB / Critique

08-09-2013 - 11:07 - Par

De Jean-Marc Vallée. Avec Matthew McConaughey, Jennifer Garner, Jared Leto. Special Presentations.

Pitch : Dans ce drame inspiré de faits réels, Matthew McConaughey incarne l’électricien texan Ron Woodroof, un homme ordinaire qui se lance dans une lutte contre l’establishment médical et pharmaceutique. En 1985, Ron apprend que, séropositif, il ne lui reste que trente jours à vivre. Alors que les traitements sont restreints aux USA et que le pays et divisé sur la façon dont il faut combattre le virus, Ron va se procurer des traitements alternatifs et non toxiques tout autour du monde et ce, via des moyens légaux et illégaux. Il crée alors un « club d’acheteurs » afin de fournir à d’autres séropositifs ces traitements.

À une époque où beaucoup trop considèrent à tort que le SIDA ne tue plus, où les campagnes de sensibilisation et de prévention sur le virus semblent avoir fléchi en intensité, DALLAS BUYERS CLUB, bien que se déroulant au milieu des années 80, vient sonner le rappel. Non pas que le nouveau projet de Jean-Marc Vallée (C.R.A.Z.Y., CAFÉ DE FLORE) se pose en « film utile », mettant le spectateur aux prises avec un déluge de pathos ou des élans pédagogiques paternalistes. Au contraire, DALLAS BUYERS CLUB livre un regard plutôt âpre et sans concession sur la maladie, mais surtout, n’est pas tant consacré au SIDA qu’à l’humain se débattant contre les adversités : la contamination hasardeuse, l’acharnement du système sur l’individu, la solitude accompagnant le rejet. Dans cette volonté de privilégier le regard individuel – le film s’ouvre d’ailleurs sur un plan subjectif – DALLAS BUYERS CLUB a la bonne idée de donner la parole à un personnage antipathique sous tous rapports : homophobe, cocaïnomane, arnaqueur, dealer, irrespectueux d’autrui, Ron Woodroof n’a rien de ces victimes tout public dont Hollywood fait des héros tire-larmes. Même s’il évolue au fil du récit, démontrant des qualités humaines que l’on n’aurait pu lui soupçonner au départ, il n’en reste pas moins un homme à la personnalité souvent mal aimable et au caractère profondément individualiste. Jusque dans son œuvre de bien social, grâce à laquelle il apporte des solutions médicinales à une foule de séropositifs dépourvus de traitement, il se définit comme un businessman. Un homme d’affaires qui « ne dirige pas une œuvre de charité » mais qui s’oppose toutefois, tel un Robin des Bois, à plus gros poissons que lui : l’industrie pharmaceutique – dont DALLAS BUYERS CLUB livre, en creux, un portrait guère reluisant – et les autorités gouvernementales – incapables de livrer des solutions à leurs citoyens.  Un homme pétri de défauts transcendé par le malheur qui l’accable et qui, alors qu’on ne lui donnait que 30 jours à vivre, va défier toutes les prédictions et survivre pendant sept ans à la maladie. Ce destin hors normes avait tout pour inspirer le cinéma, mais l’on est gré à DALLAS BUYERS CLUB de ne pas en faire non plus un étendard romanesque. Certes, le film y perd en émotion mais la performance rugueuse, heurtée et pourtant aérienne de Matthew McConaughey – qui va bien au-delà de son impressionnante perte de poids – suffit à empêcher DALLAS BUYERS CLUB de sombrer dans la rigueur clinique. Son regard incandescent de combattant et sa malice de survivant emportent tout sur leur passage et font oublier les faiblesses patentes de rythme d’un film se perdant un peu trop souvent dans la redondance narrative.

De Jean-Marc Vallée. Avec Matthew McConaughey, Jennifer Garner, Jared Leto. États-Unis. 1h57. Prochainement

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