Toronto 2013 : ALL IS BY MY SIDE / Critique

12-09-2013 - 12:10 - Par

De John Ridley. Avec André Benjamin, Imogen Poots. Special Presentations.

Pitch : 4 juin 1967, Jimi Hendrix s’apprête à jouer au Saville Theater de Londres. Un concert mythique durant lequel il effectua une reprise de « Sgt Pepper’s Lonely Hearts Club Band » deux jours seulement après la sortie de l’album des Beatles. Un an auparavant, à New York City, Jimi, qui se nommait alors Jimmy James et n’était que guitariste accompagnateur dans un groupe, est repéré dans un club par Linda Keith, petite amie de Keith Richards…

La présentation de 12 YEARS A SLAVE à Toronto, dont il a écrit le scénario, n’était pas la seule actualité de John Ridley. En effet, le scénariste, producteur et romancier projetait ces jours-ci son deuxième film de réalisateur (après COLD AROUND THE HEART en 1997), ALL IS BY MY SIDE. Un projet extrêmement ambitieux puisqu’il conte revenir sur les débuts tonitruants de Jimi Hendrix et plus particulièrement sur son départ de New York pour Londres où, encouragé par Linda Keith et managé par Chas Chandler (ancien bassiste des Animals) il devint une rock star légendaire. Seul problème ? Les ayants droit d’Hendrix n’ont jamais approuvé l’existence d’ALL IS BY MY SIDE et ainsi refusé l’utilisation de toute chanson originale dans le film – alors qu’on y entend par deux fois des tubes de Bob Dylan. Une contrainte qui handicape grandement le projet. Non pas qu’un tel biopic ne doive se bâtir que sur l’œuvre de l’artiste dont il traite l’histoire. D’autant que si ALL IS BY MY SIDE n’use d’aucun tube d’Hendrix, les scènes musicales parviennent – par le truchement de reprises d’autres chansons faites par le musicien, dont celles de « Wild Thing » ou « Sgt Pepper’s » – à restituer à la perfection le son si particulier du musicien. Pourtant, la frustration est totale : dès qu’André Benjamin, très convaincant dans le rôle, saisit sa guitare et effectue trois accords, impossible de ne pas s’attendre à entendre retentir l’intro de « Purple Haze » ou « Foxy Lady », deux des morceaux emblématiques du premier album d’Hendrix sorti durant la période couverte par le film. Une frustration qui tire perpétuellement ALL IS BY MY SIDE vers le bas, l’empêche de vraiment prendre son envol, de vibrer au diapason de l’exaltation typique de la musique d’Hendrix. Dès lors, puisque l’on ne peut se laisser porter par les chansons du guitariste, les défauts principaux d’ALL IS BY MY SIDE se font plus remarquables, plus gênants. Parmi eux, une narration flottante, s’attardant sur certains points sans en délivrer aucune clé psychologique – la supposée violence d’Hendrix à l’égard de sa compagne –, oubliant certains autres en cours de route – sa relation complexe avec Linda Keith (excellente Imogen Poots), traitée ostensiblement au départ, puis peu à peu diluée jusqu’à être inexistante à l’écran. Manquant d’un poil de rigueur, ALL IS BY MY SIDE aurait peut-être gagné à voir son montage resserré. On notera également d’autres petites maladresses, notamment dans la façon dont le film tente de se donner des airs « expérimentaux » en multipliant des chevauchements de scènes (par le son ou l’image) ou des coupes sèches et arbitraires. En revanche, ALL IS BY MY SIDE parvient à capturer l’essence des 60’s par sa réalisation très « cinéma vérité » – notamment dans les scènes de clubs ou de coulisses, où la caméra est posée là, à enregistrer sans avoir l’air de vouloir mettre en forme ce qu’elle voit – lorgnant très clairement vers le travail du documentariste D.A. Pennebaker. Une certaine énergie formelle se dégage ainsi du film, et en dépit de tous ses défauts narratifs et de son manque d’intérêt fondamental, on se laisse aisément porter par ce portrait d’Hendrix. D’autant que l’angle choisi par Ridley – observer la légende à travers ses relations avec deux femmes importantes de sa vie – évite à ALL IS BY MY SIDE de tomber trop avant dans les passages obligés du biopic calibré et mainstream.

De John Ridley. Avec André Benjamin, Imogen Poots, Hayley Atwell. États-Unis / Irlande / Royaume-Uni. 1h58. Prochainement.

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