NOS PIRES VOISINS : chronique

05-08-2014 - 12:50 - Par

Après les sommets de 5 ANS DE RÉFLEXION, Nicholas Stoller retombe dans la comédie régressive lourdingue. Efficace mais très limité.

Petit artisan discret de la comédie, Nicholas Stoller, scénariste/réalisateur, a construit au fil de ses projets une œuvre marquée par un sens singulier des personnages et du gag. De la rupture « à poil » de SANS SARAH RIEN NE VA à la déchéance physique du couple contrarié de 5 ANS DE REFLEXION, Stoller fait rire à grands coups de sadisme et de sentiments. Comme dans des films de Rohmer débridés et burlesques, l’amour et ses petites contrariétés deviennent, dans ses films, de véritables embûches herculéennes qui mettent à mal le cœur mais surtout le corps. Harnaché à l’écurie Apatow, il n’en faudrait pas beaucoup pour qu’il prenne la place du barbu dépressif sur le trône tant convoité de la comédie américaine. Là où les personnages d’Apatow dissertent sans cesse sur le mal de vivre ou de grandir, Stoller, lui, envoie ses personnages au casse-pipe et filme frontalement l’insurmontable difficulté d’être heureux. Le début de NOS PIRES VOISINS laisse donc espérer la suite parfaite de son précédent chef-d’œuvre. On avait quitté les amoureux de 5 ANS DE REFLEXION main dans la main, inquiets mais heureux de découvrir la vie à deux. Les premières minutes de ce nouveau film dessine donc avec beaucoup d’humour l’angoisse du trentenaire fraîchement établi. Un adorable bébé entre les pattes, le sourire crispé sur un visage défait, le couple nage dans le bonheur. À moins qu’il ne soit en train de se noyer ? L’installation d’une fraternité, bruyante et festive, juste à côté de leur maison, va réveiller leurs pires démons. Par un effet miroir, les personnages vont devoir faire le choix entre leur confort d’adulte bourgeois ou le fantasme de leur jeunesse enfuie. Sur le papier, c’est drôle, c’est méchant et ça pourrait même vous revenir en pleine face! Mais au bout de trente minutes, le film a choisi son camp : celui de la fête, débridée et éNOOOOORMe. La tendresse et la méchanceté du début laissent place à un humour de « chambrée », parfois amusant, mais qui rabaisse le film au ras du tout- venant de la comédie US. Devenu un « party movie », NOS PIRES VOISINS en oublie vite ses personnages et se contente d’enfiler les gags supposément trash façon « Gué-guerre des Roses ». Comme phagocyté par son casting so cool (Rogen, Efron), le film se croit à tort transgressif. Jamais inquiétant, mollement enragé, il se contente surtout d’une morale tiède assez insupportable sur les valeurs de la famille et la beauté de la jeunesse. Défouloir efficace mais terrible comédie, on oubliera donc volontiers de sa filmographie ce film non-écrit par Stoller. Une erreur de jeunesse, probablement…

De Nicholas Stoller. Avec Zac Efron, Seth Rogen, Rose Byrne. États-Unis. 1h37. Sortie le 6 août

 

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