Toronto 2014 : TOKYO TRIBE / Critique

07-09-2014 - 08:26 - Par

Sans aucun doute ce que le festival de Toronto pourra présenter de plus déglingo cette année. De loin. Toutes sections confondues.

Couronné du prix du public de la Midnight Madness l’an dernier pour WHY DON’T YOU PLAY IN HELL ?, le cinéaste japonais Sono Sion remet le couvert en 2014 en ouvrant la même Midnight Madness avec son nouvel opus, TOKYO TRIBE, adaptation d’un manga de Santa Inoue. Et le mot opus s’avère totalement adéquat puisqu’il s’agit… d’une comédie musicale rap située dans les ghettos d’une Tokyo du futur. Rien que ça devrait suffire à expliciter la folie furieuse que constitue TOKYO TRIBE, mais ajoutons à cela qu’on y suit plusieurs gangs se disputant divers territoires, jusqu’à ce que l’accumulation de tension ne mène à une nuit d’enfer. D’autant que le terrible Mera, grande baraque peroxydée aimant se balader torse poil et/ou en string ficelle, aimerait bien dessouder Kai, leader d’une bande de rappers hippies prônant l’amour, la paix et la joie. Saupoudrez d’une foultitude de sous-intrigues et de personnages plus ou moins grotesques et vous obtenez le film le plus foncièrement maboul du festival de Toronto 2014. Le plus surprenant étant que TOKYO TRIBE parvienne à tenir debout et à tenir en haleine pendant près de deux heures. Sans ne jamais faiblir. La force du film réside en effet dans son caractère hypnotique, ces deux heures quasi ininterrompues de rap nippon finissant par œuvrer comme un mantra harassant et envoûtant dont on est incapable de se départir. Surtout, TOKYO TRIBE est si jusqu’au-boutiste, l’univers si remarquablement détaillé (production design, décors, costumes, maquillages etc), les trouvailles humoristiques si absurdes (une grand-mère DJ à la langue bien pendue, une beat-boxeuse hilarante), l’esprit si foncièrement grivois (fesses de mâles, poitrines de filles, tout le monde est servi), les chansons si étrangement efficaces, les bastons si énergiques, qu’on ne peut s’empêcher d’être rivé au siège en attendant de voir jusqu’où ira le cinéaste, quelle sera sa prochaine invention. Certes, la fascination qu’exerce TOKYO TRIBE n’a sans doute rien d’universel. Bien des spectateurs ne pourront supporter autant d’images et de sons concentrés en un seul film, d’autant que Sono Sion use d’une ‘caméra volante’ rappelant celle d’ENTER THE VOID aux mouvements incessants. À quoi tout cela sert-il au final ? À rien, dit le réalisateur dans l’une des poilantes dernières scènes. Si ce n’est à proposer une expérience de cinéma radicale, inventive, inédite et fondamentalement généreuse.

De Sono Sion. Avec Ryohei Suzuki, Riki Takeuchi, Hitomi Katayama. Japon. 1h56. Prochainement

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