Toronto 2014 : WHILE WE’RE YOUNG / Critique

08-09-2014 - 23:26 - Par

Une comédie dramatique sociale au message simpliste et qui peine à susciter la moindre empathie.

Noah Baumbach n’a jamais caché son amour pour la France et la culture française. Visiblement, il a poussé cette affection un peu trop loin sur WHILE WE’RE YOUNG dont le récit a malheureusement les atours inconséquents d’un film bien de chez nous qui croirait réinventer la sociologie. S’ouvrant sur une succession de quelques répliques tirées de la pièce « Solness le constructeur » d’Henrik Ibsen et évoquant la peur que peut susciter la jeunesse chez les plus âgés, WHILE WE’RE YOUNG entend explorer ce que signifie de vieillir en couple dans une société qui célèbre la volatilité, la fraîcheur et la spontanéité au lieu de l’expérience, la routine et la réflexion. Josh (Ben Stiller), documentariste new-yorkais bossant ardemment depuis dix ans sur son nouveau film vit heureux avec Cornelia (Naomi Watts). Leur seul problème : tous leurs amis ont désormais des enfants et le font un peu trop savoir. Lorsque le couple rencontre Jamie (Adam Driver) et Darby (Amanda Seyfried), deux amoureux de 25 ans épris de liberté, de culture et de glaces bio, c’est le ‘coup de foudre’. À leur contact, Josh et Cornelia retrouvent une deuxième jeunesse. Mais tout cela est-il bien réel ? Surtout, est-ce bien nécessaire ? Dans son premier tiers, WHILE WE’RE YOUNG fait des étincelles : Baumbach y rie sardoniquement de ces jeunes parents donnant l’impression d’avoir enfanté le monde en créant la vie, tout autant qu’il raille son couple star (« On a la liberté, ce qu’on en fait n’a pas d’importance ») ou son duo de jeunes hipsters aux « goûts démocratiques ». Il renvoie dos à dos ces quadra vivant dans la modernité technologique pour ne pas perdre le fil et ces jeunes se délectant du vintage en une tentative désespérée de se créer une identité. La pression sociale d’être mère, celle d’être cool, de trouver sa place, de marquer son temps, d’avoir quelque chose à dire ou à défendre : la société des années 2000 prend ici vie sous le microscope de Baumbach. Une satire rigolarde mais tendre puisqu’on y décèle un autoportrait du réalisateur (voir notre entretien du réalisateur, mené à la sortie de FRANCES HA). Tout se gâte quand WHILE WE’RE YOUNG entre dans le vif du sujet et abat ses enjeux dramatiques. Moins drôle et plus grinçant, moins vif et plus démonstratif, le film prend alors des routes franchement prévisibles. Baumbach pointe du doigt le manque de spontanéité d’une certaine jeunesse cherchant la réussite, autant que l’immobilisme de quadra embrassant la complainte pour s’excuser de ne pas prendre en main leur vie. Sauf que ce que dit WHILE WE’RE YOUNG sur ces sujets n’a au final rien de bien mordant et Baumbach sombre même dans la platitude (vieillir, c’est nul). Enfin, bien que décidé à aborder des sujets de société contemporains de manière réaliste, le réalisateur ne daigne pas faire évoluer ses personnages dans un univers crédible (quel hipster de 25 ans sans réelle source de revenus vit dans un loft à New York ?), alors qu’il avait su le faire dans FRANCES HA, sans perdre pour autant ses élans romanesques et hippie chic. Un détail qui pose toutefois problème, puisqu’il limite l’identification aux personnages et empêche ainsi le film de compenser la faiblesse de son message par l’émotion.

De Noah Baumbach. Avec Ben Stiller, Naomi Watts, Adam Driver, Amanda Seyfried. États-Unis. 1h34. Prochainement

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