LES BOXTROLLS : chronique

15-10-2014 - 08:46 - Par

Sa richesse esthétique et thématique permet à la nouvelle animation des studios Laika de surmonter un premier acte bancal et erratique.

Les studios Laika pourraient embrasser comme credo une des répliques de leur nouveau film, LES BOXTROLLS: « Les gens aiment les héros imparfaits ». Avec CORALINE et L’ÉTRANGE POUVOIR DE NORMAN, ils s’étaient fait les champions d’une animation hors de la norme hollywoodienne: portés sur le stop motion, ils ont développé depuis leurs débuts des univers étranges et marginaux, loin de toute considération commerciale. On imagine que les artistes de Laika voient aujourd’hui en leur Boxtrolls de potentielles poules aux œufs d’or type Minions. Sans doute vivent-ils dans un autre monde, tant LES BOXTROLLS s’avère une nouvelle fois sans concession. Séquence d’ouverture digne d’un film de la Hammer, décapitation d’ours en peluche, festin d’insectes gluants, chanteuse travesti(e), petite fille aux instincts morbides, allergies déformantes, esclavagisme, etc.: ici, on ne brosse pas le spectateur dans le sens du poil et les gamins risquent bien de brailler d’effroi devant tant d’images déstabilisantes et de personnages dont la laideur intérieure se traduit par un character design foncièrement dérangeant. Certes, cet anticonformisme fait la force du cinéma de Laika. Pourtant, il n’empêche pas LES BOXTROLLS de ramer dans sa première demi-heure: l’exposition des enjeux –une petite ville tente de lutter contre des monstres souterrains, les Boxtrolls, croyant qu’ils enlèvent et dévorent les enfants alors qu’ils ne sont que des êtres doux épris de mécanique – s’avère laborieuse. Le rythme, lui, est claudiquant. Heureusement, les prodiges techniques de Laika pallient le manque de passion suscité par cette (longue) introduction : jamais n’avait-on vu une animation stop motion aussi fluide et maîtrisée. Un exploit d’autant plus impressionnant que les artistes font preuve d’une folle ambition dans l’ampleur des décors, les cadrages, les mouvements de caméra ou le montage. Puis, tout à coup, LES BOXTROLLS s’envole : à la faveur d’un rebondissement dramatique poignant, le récit captive enfin. Alors que Eggs, jeune garçon orphelin élevé par les Boxtrolls, tente de sauver ses amis de l’extermination, LES BOXTROLLS met de côté son envie forcenée de casser les codes et mise sur la parabole simple et sincère. En l’occurrence, un plaidoyer vibrant et malin pour la différence et le vivre ensemble mais aussi, et c’est plus notable (et audacieux), les nouveaux modèles familiaux. Une histoire bouleversante et humaniste, qui parvient même à faire oublier les prouesses techniques – qu’une scène post-générique hilarante rappelle néanmoins avec malice – et s’inscrit durablement dans le cœur du spectateur.

De Graham Annable & Anthony Stacchi. Avec les voix de Ben Kingsley, Simon Pegg, Elle Fanning. États-Unis. 1h37. Sortie le 15 octobre

 

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