COLD IN JULY : chronique

31-12-2014 - 11:21 - Par

Jim Mickle adapte Joe R. Lansdale : s’il perd la subtilité et la tristesse du roman, il signe un polar redneck souvent surprenant.

Richard Dane, citoyen modèle et père de famille, abat un intrus dans son salon. Le père de sa victime commence bientôt à le traquer. À l’instar de son précédent film WE ARE WHAT WE ARE, le nouvel opus de Jim Mickle, adapté de l’excellent roman « Juillet de sang » de Joe R. Lansdale (voir p.26), a l’ambition d’hybrider les genres – lesquels ? Laissons la surprise. Ainsi, Mickle évite de baliser le terrain et préfère privilégier l’incertitude grâce à de savantes ruptures de ton et de déconcertants revirements narratifs. Ce foisonnement, s’il nuit à la cohérence du film, contribue néanmoins à la densité du regard porté sur les personnages et leur environnement – le Texas de la fin des 80’s. Le portrait que Mickle fait d’une certaine Amérique sudiste – celle qui conclut ses messages de répondeur par un « Dieu vous bénisse ! », qui glorifie l’autodéfense et où des « putes latinos sans papiers [peuvent disparaître], tout le monde s’en fout » – entre immédiatement en conflit avec ce qu’est Richard au début du récit. Un homme simple et timide, qui détient l’arme de son père mais n’en a jamais fait usage, qui confie « avoir failli chier dans son froc » quand il a tué l’homme ayant pénétré dans sa maison. Et qui assure « se sentir merdique » après son acte de riposte. Dès lors, Mickle dissèque la progression de Richard, la façon dont le sang appelle le sang, dont son geste inaugural ouvre en lui des portes insoupçonnées, crée des désirs de violence toujours plus marqués, une grande soif de justice – aussi mal placée soit-elle – et une certaine défiance envers l’autorité – surtout lorsqu’elle est corrompue. Entre le premier plan sur Richard dans son lit, terrifié d’entendre un bruit suspect, et la toute dernière scène de COLD IN JULY, qui le replace dans le même lit, ce n’est pas simplement de l’eau qui a coulé sous les ponts mais des seaux entiers d’hémoglobine que l’on a déversés dans les toilettes avant de tirer la chasse. En usant de protagonistes à la psychologie stéréotypée, Jim Mickle dérape parfois – Ann, l’épouse de Richard, s’avère par trop caricaturale, à mille lieues de ce qu’elle était chez Lansdale – mais ancre COLD IN JULY dans un non- réalisme assumé, où s’accordent esthétisme de la violence et propos rentre-dedans. D’aucuns verront dans ce COLD IN JULY une œuvre moralement tendancieuse, là où le roman s’avérait plus clair, plus désenchanté et plus triste. Mickle, s’il joue sur cette ambiguïté morale, laisse le spectateur décider : le film assène-t-il une vérité premier degré ou observe-t-il l’évolution de Richard avec une grande ironie ?

De Jim Mickle. Avec Michael C. Hall, Sam Shepard, Vinessa Shaw. États-Unis. 1h49. Sortie le 31 décembre

 

Pub
 
 

Les commentaires sont fermés.