Le journalisme d’investigation selon Thomas McCarthy : intelligent, prenant, divertissant, émouvant. Un véritable grand chelem.
« Le savoir est une chose. La foi en est une autre », dit un cardinal de l’Église catholique dans SPOTLIGHT. Mais pour les journalistes d’investigation au centre du récit, l’un ne va pas sans l’autre : la quête de vérité qui dirige leur travail s’apparente à un sacerdoce. Boston, juin 2001. Au sein du Globe, l’équipe de Spotlight – quatre personnes dévouées à des enquêtes confidentielles menées sur plusieurs mois, parfois une année –, se met à plancher sur un sujet forcément polémique dans cette ville très pieuse : l’Église aurait couvert les agissements de prêtres pédophiles. Au centre de SPOTLIGHT trône la ferveur avec laquelle les reporters font leur travail : habités, déterminés, charismatiques, ils fascinent mais le réalisateur Thomas McCarthy prend pourtant bien soin de ne pas les glamouriser, de ne pas en faire des figures simplistes et chevaleresques ou des hérauts paternalistes. Ici, l’éthique et la vérité sont les héroïnes. Inspiré de faits réels – l’article des journalistes du Globe leur a valu le Pulitzer –, SPOTLIGHT se repose sur cette galerie de personnages redoutablement croqués et remarquablement interprétés pour dérouler l’enquête. Volontairement anti spectaculaire, SPOTLIGHT refuse l’effusion, le drame facile et le vain antagonisme. À ce titre, le personnage de Liev Schreiber, le nouveau patron du Globe, aurait pu faire un « méchant idéal », un empêcheur de tourner en rond – il se révèle calme, juste, réfléchi, anti conflictuel. Protégés par la mise en scène discrète de McCarthy – qui se permet tout de même quelques très jolis gros plans –, le scénario et les acteurs peuvent ici prendre toute la place, servant ainsi les faits qu’ils exposent. Lors de scènes d’interview par les journalistes, McCarthy donne aussi intelligemment la parole aux victimes, sans pathos ni racolage. Porté par ce tact mais aussi son refus d’aseptiser la réalité, SPOTLIGHT accroît son impact. Il entre ainsi dans la catégorie de ces rares films capables d’aborder des faits réels tragiques tout en étant profondément divertissants et accessibles. Car, emporté par la machine qu’est l’investigation des reporters, le film s’impose en thriller imparable, alerte et captivant, mais aussi en chronique quasi documentaire, profondément humaine – en dépit de la noirceur de l’enquête, SPOTLIGHT est souvent très drôle. Pas étonnant que dans ses influences, McCarthy cite FROST/NIXON, NETWORK, LES HOMMES DU PRÉSIDENT ou RÉVÉLATIONS. SPOTLIGHT partage avec ses aînés une générosité, une intelligence et un souci de sobriété qui en font une évidente et indéniable réussite.
De Thomas McCarthy. Avec Mark Ruffalo, Rachel McAdams, Liev Schreiber. États-Unis. 2h08. Sortie le 27 janvier
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