Michael Bay revient sur l’attaque d’un complexe diplomatique américain à Benghazi, en Libye, en septembre 2012.
Certains disent que Michael Bay ne sait pas ce qu’il filme, qu’il se contente de capter un boxon visuel et de rabâcher un propos bas du front. Comme NO PAIN NO GAIN, 13 HOURS prouve que le réalisateur sait précisément ce qu’est son cinéma et au service de quelles histoires il peut être le plus utile. Hier, il mettait son style tape-à-l’œil et ses blagues hétéro-beauf au service d’un film sur la vulgarité américaine, aujourd’hui, c’est son talent pour la désincarnation et l’abstraction qu’il prête à un film de guerre. Les erreurs de PEARL HARBOR derrière lui, il filme désormais les conflits modernes, ceux qui, justement, sont abstrus en ce sens que leurs origines sont floues, leurs idéologies, pas nettes, et les ennemis, fondus dans la population survolée par des drones. Nous sommes dans la Libye de 2012, désertée par toute âme américaine sur ordre de la Maison-Blanche. Reste une antenne consulaire secrète où logent des agents de sécurité sous contrat pour la CIA, anciens SEALs ou anciens Black Ops… Quand l’ambassadeur des États-Unis revient sur place pour une mission pacifiste, sa planque est attaquée. Et les ex-militaires doivent prendre les armes pour défendre les Américains présents sur place. Un pitch on ne peut plus concret que Michael Bay enrobe d’une nébuleuse humaine et diplomatique. Il n’est donc pas rare d’entendre des dialogues sur l’irresponsabilité du gouvernement, venu semer le trouble au Moyen-Orient et reparti en s’en lavant les mains. 13 HOURS est un film sur l’absence d’ordre et d’autorité quand l’ingérence tourne au vinaigre. Bay fait montre d’un grand talent pour bâtir une forte tension ex nihilo (un gros plan en contre-plongée et voilà que le cœur du film s’accélère). Quand ses militaires fendent une foule armée de Libyens amis et ennemis mélangés, le réalisateur crée un chaos fantomatique époustouflant. Il y oppose des soldats poussés dans les plus sombres retranchements du dévouement patriotique, dans ce qui est un film ni antiaméricain, ni antiguerre, mais pro-soldat. À bien des titres, 13 HOURS est à jumeler avec DU SANG ET DES LARMES, pour leur manière similaire de prendre la guerre comme un état de fait et de saluer ces types qui vont au front. Même si des médias américains ont supputé que le film pourrait nuire à la campagne présidentielle d’Hillary Clinton, secrétaire d’État à l’époque des faits, la politique n’est qu’une portion congrue du propos général, plus humain. Mais Michael Bay oblige, le film finit par en faire des caisses en matière de sentimentalisme en même temps qu’il se conclut avec un propos très sévère sur son pays. Un réalisateur de paradoxe, jusqu’au bout.
De Michael Bay. Avec John Krasinski, James Badge Dale, Max Martini. États-Unis. 2h20. Sortie le 30 mars
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