Cannes 2016 : APNÉE / Critique

16-05-2016 - 22:42 - Par

Cannes 2016 : APNÉE

De Jean-Christophe Meurisse. Semaine de la critique, séance spéciale.

Synopsis officiel : Céline, Thomas et Maxence marchent toujours par trois. Comme la trilogie de la devise républicaine. Ils veulent se marier, une maison, un travail, des enfants sages et manger tous les jours des huîtres. Insoumis et inadaptés à une furieuse réalité économique et administrative, ils chevauchent leurs quads de feu et traversent une France accablée, en quête de nouveaux repères, de déserts jonchés de bipèdes et d’instants de bonheur éphémère.

Ça y est, on le tient ! Alors que la France se demande comment se remettre « Debout », il fallait bien que le Festival de Cannes soit le digne témoin de cet agacement général. Et on est plutôt très heureux que ce soit les fous furieux Chiens de Navarre, troupe de théâtre iconoclaste et brillante, qui s’en soit chargée. Prophétique ou simplement concerné, il n’empêche qu’APNÉE dézingue avec un humour et une colère joyeusement subversive le monde tel qu’il ne tourne vraiment plus rond. Cet itinéraire foutraque d’un « trouple » en quête d’un endroit pour être heureux permet à Jean-Christophe Meurisse et à sa bande d’acteurs foufous de divaguer joyeusement en tapant, sans même que l’on s’en rende tout de suite compte, là où ça fait mal. Un entretien d’embauche qui vire au calvaire répétitif, une visite d’appart délirante, un repas le dimanche en famille comme un condensé de vie, une demande de prêt à la banque pleine d’innocence : chacune des séquences qui construisent le film interrogent avec une naïveté joyeuse et un soupçon d’ironie les fondements de la société contemporaine. Mais l’énergie un peu punk du film ne dérape jamais dans la démagogie ou le défouloir libertaire. APNÉE s’inquiète tout en s’amusant. C’est un film de clowns qui nous tend un miroir déformant de la France contemporaine pour mieux nous inciter à faire la fête sur la musique de la Compagnie créole. Profondément en colère mais jamais aigre ou vindicatif, APNÉE a tout des VALSEUSES next gen. Mais il a surtout l’intelligence et la générosité de rester un OVNI assumé, un patchwork décousu plein de punchlines et de situations qu’on rêverait oser faire. De ce ballet de patineurs naturistes au plan final complètement cramé, les héros d’APNÉE auront sacrifié leur liberté pour trouver un peu de place dans la société. Le film, lui, ne se sacrifie à rien et fait un bien fou.

De Jean-Christophe Meurisse. Avec Céline Fuhrer, Thomas Scimeca, Maxence Tual. France. 1h29. Prochainement

 

 

 

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