Cannes 2016 : LA FORÊT DE QUINCONCES / Critique

17-05-2016 - 13:00 - Par

Cannes 2016 : LA FORÊT DE QUINCONCES

De Grégoire Leprince-Ringuet. Sélection officielle, Hors Compétition, Séances spéciales.

Synopsis (officiel) : Ondine et Paul se sont aimés. Quand elle le quitte, il jure qu’il n’aimera plus. Pour se le prouver, il poursuit la belle Camille, qu’il compte séduire et délaisser. Mais Camille envoûte Paul qu’elle désire pour elle seule. Et tandis qu’il succombe au charme de Camille, Paul affronte le souvenir de son amour passé.

On aurait très envie de balayer d’un sourire moqueur le premier film de Grégoire Leprince-Ringuet si ce dernier n’était pas à ce point un symptôme pénible d’un certain cinéma d’auteur français. Sur le papier, on en rirait presque : un film en vers, écrit et réalisé par un jeune premier du cinéma français, pensez- donc, c’est la fête au cynisme et au mauvais esprit ! Hélas, au vu du désastre et du sérieux de l’objet en question, c’est l’abattement et l’agacement qui priment. Comment un tel pensum peut-il atterrir dans les salles du plus grand festival du cinéma du monde ? Dans ses rares moments supportables, LA FORÊT DE QUINCONCES ressemble à une mauvaise copie de LA BELLE PERSONNE de Christophe Honoré. Soit des jeunes gens un peu pâlichons qui dissertent sur le sentiment amoureux dans des rues et des couloirs. Tout ça, sans la grâce romanesque d’Honoré ni même la complexité de « La Princesse de Clèves ».

Mais le plus souvent, le film s’apparente plutôt au projet de fin d’études d’Hypokhâgneux, option théâtre-cinéma. Des actrices qui sur-jouent tout, de la mélancolie mélancolique au mystère mystérieux à un Grégoire Leprince-Ringuet qui promène son air de chien battu en se donnant des airs de mâle alpha, rien dans ce trio amoureux ne fonctionne et surtout pas la vérité ou même le romanesque des sentiments. Il a beau faire disserter ses personnages pendant de longues tirades aux détours alambiqués sur la séparation et sa douleur, il a beau multiplier les effets de rupture et les licences poétiques, le film étonne par son immaturité. Sur l’amour, le film cumule tous les poncifs « romantiques » mais attention, ici au sens littéraire du terme : souffrance, déréliction, hasard et pourrissement de tout. Un bon « package » lourdaud que le film rebat, du coup de foudre urbain jusqu’à la folie passagère. Sorcière ou harpie, les femmes de la FORÊT DE QUINCONCES n’ont pas le beau rôle et le pauvre petit coq doit apprendre à guérir de leurs méchantes blessures. Soupçon de misogynie ? C’est en tout cas l’effet désagréable que produit le film. On nous répondra qu’il s’agit d’une tragédie, que tout ceci est en vers et qu’il faut lire ici l’allégorie à tous les carrefours (image bien soulignée par cette forêt dont on ne peut sortir). Mais c’est bien ça le problème : bardé de références, de citations et de mystiques poétiques, LA FORÊT DE QUINCONCES n’est qu’une démonstration pénible et insupportable de la biblio-dvd-thèques d’un jeune réalisateur qui tourne en rond. Le pire, c’est qu’on imagine Grégoire Leprince-Ringuet sincère et habité par ses vers de mirlitons et ses effets de cinéma hyper éculés. C’est bien là le symptôme d’un cinéma autocentré qui confond inspiration et vanité.

De Grégoire Leprince-Ringuet. Avec Grégoire Leprince-Ringuet, Pauline Caupenne, Amandine Truffy. France. Sortie le 22 juin

 

 

 

 

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