Cannes 2017 : A PRAYER BEFORE DAWN / Critique

20-05-2017 - 18:20 - Par

Cannes 2017 : A PRAYER BEFORE DAWN

De Jean-Stéphane Sauvaire. Sélection officielle, séances de minuit.

Synopsis : Billy Moore, ancien héroïnomane et taulard anglais, refait sa vie en Thaïlande. Ses combats de Muay Thai le mènent à replonger dans la drogue. Bientôt, il est incarcéré et vit « une expérience barbare » faite de violence, de privation et de déshumanisation.

Tout commence par les rituels préparatoires à un combat de boxe thaï. Billy Moore, un Européen expatrié, et son camarade thaïlandais sont scrupuleux. Ils se chauffent respectivement les muscles, se concentrent, se motivent. Bientôt, ils monteront sur le ring et se feront démonter la gueule autant qu’ils exploseront leur adversaire. Il y a dans ce sport de combat une envie de se confronter à la douleur et à ses limites et derrière l’apparent chaos, une discipline de vie. Un Blanc qui retourne à la source de la boxe thaï et pratique parmi les puristes, entretient probablement un rapport complexe avec la vie, avec la mort. Billy est héroïnomane et lorsque la police locale le jette en prison, le besoin de drogue, l’envie de vivre et l’appel permanent de la mort vont rythmer ses jours. Le film est à l’image de la valse enivrante qu’il danse au quotidien : les images sont une transe en continue, un flow de stimuli, parfois stoppé net et hurlant de peine. Dans sa première partie, A PRAYER BEFORE DAWN est une longue agonie, de scènes choquantes, de brutalité, de cris. Un dispositif visuel et sonore immersif avec lequel Jean-Stéphane Sauvaire, déjà réalisateur du très âpre JOHNNY MAD DOG, nous propose de vivre la vie de Billy. Aucune traduction du thaï au français, des invectives et des coups, l’expérience est viscérale, épuisante. Si Billy est forcé d’être témoin d’un viol en réunion, nous aussi. Il est brimé ? On se sent agressé. Sa drogue devient notre dégoût, ses vertiges nous donnent le tournis. Et lorsque, enfin, il décide de reprendre la boxe, alors que le film reprend une dynamique ascendante, alors A PRAYER BEFORE DAWN sort du chaos et se structure de lui-même. Le film devient plus narratif – sans que ce soit un défaut -, le jeu de Joe Cole s’affine, de la douceur se mêle doucement à sa rage. On parle d’une performance de l’ordre de celles d’un Tom Hardy dans BRONSON puis d’un Tom Hardy dans WARRIOR. Le film de Jean-Stéphane Sauvaire n’est ni dans le baroque du film de Refn ni dans le classicisme du drame de Gavin O’Connor. Mais il en emprunte la folie d’une part et le sentiment de l’autre. On a beaucoup comparé A PRAYER à MIDNIGHT EXPRESS et c’est vrai que de la drogue à l’expérience destructrice de la prison, la parallèle est facile à faire. Mais dans le lien qui se noue entre Billy et les prisonniers boxeurs, que l’on soupçonne plus documentaire que fictionnel, dans l’affection qu’il développe pour l’un des ladyboy, le film est plus intérieur. Et dans cette façon dont, en prison, Billy semble étrangement à part et étrangement dans son élément, A PRAYER s’ouvre à tout un tas de question sur le destin et la résilience. Film choc, ultraviolent, qui finit dans un élégant apaisement, le nouveau film de Jean-Stéphane Sauvaire, comme son précédent, tente de sublimer la lumière au bout des longs tunnels de douleur.

De Jean-Stéphane Sauvaire. Avec Joe Cole. Royaume-Uni/France. 2h. Prochainement

 

 

 

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