LE ROI ARTHUR – LA LÉGENDE D’EXCALIBUR : chronique

11-05-2017 - 13:07 - Par

LE ROI ARTHUR - LA LÉGENDE D’EXCALIBUR : chronique

Guy Ritchie n’a jamais été porté sur la sagesse ou la politesse. Il le confirme avec panache sur LE ROI ARTHUR, effusion d’images et de sons qui mène le blockbuster mainstream vers des territoires à la limite de l’expérimental. Totalement fou.

Tout commence avec une attaque du Mage Mordred sur la cité-forteresse du Roi Uther-Pendragon. Hommes, mages et éléphants géants s’opposent dans une séquence introductive d’un opératisme véhément qui, par la puissance intrinsèque des images qu’elle propose, abasourdit. Après avoir clairement fait lorgner son ROI ARTHUR vers LE SEIGNEUR DES ANNEAUX, Guy Ritchie reprend subitement les rênes: le générique se mue en néo-clip, le montage s’accélère, les ellipses s’enchaînent avec fluidité, le temps file alors qu’une musique énergique de Daniel Pemberton, faite de hurlements, de cordes et de souffles courts, emballe le tout. SNATCH rencontre SHERLOCK HOLMES, à une époque pré-médiévale, dans un monde fantasy. Guy Ritchie, cinéaste guère porté sur le bon goût ou le consensus, a ce talent évident pour faire muter son cinéma, s’approprier des univers, les modeler – parfois par la force – à son image. Le tout pour des longs- métrages idiosyncrasiques mais différents, mus par des intentions parfois opposées. Son film précédent, AGENTS TRÈS SPÉCIAUX, refusait l’action – voire le spectaculaire – pour fusionner vintage et modernité, élégance et trivialité. LE ROI ARTHUR opère un virage à 180° pour proposer une expérience portée quasi entièrement sur le mouvement, l’action et l’énergie. Mieux : une expérience portée quasi entièrement PAR le mouvement, l’action et l’énergie. Guy Ritchie semble se refuser à toute patience et impose de facto son univers dès les premières minutes, quitte à s’aliéner certains spectateurs – et notamment les réfractaires à son style cinétique. Construit par accumulation de strates, LE ROI ARTHUR est un exercice savant de montage qui bouscule les temporalités et use d’un langage davantage visuel que verbal. Un agrégat d’influences disparates (ici une bataille en séquence rappelant MATRIX RELOADED, là un corps à la dérive renvoyant à l’Ophélie du peintre préraphaélite John Everett Millais) ; d’images à la puissance d’évocation écrasante (un aigle qui s’oppose à un bourreau, une main qui sort de la boue…) ; de sons furieux. Dans ce collage ultra maîtrisé, la musique de Daniel Pemberton joue un rôle majeur : étrange, insensée, fougueuse, tout simplement remarquable, elle nourrit le récit de son énergie frénétique et de son audace, elle agit comme une centrifugeuse qui rend l’ensemble très cohérent. Certes, ce tour de force visuel et sonore a son revers : laissant la part belle aux sensations du spectateur, à la capacité de celui-ci à se laisser aller, à se laisser déborder, à nourrir son visionnage de sa propre connaissance des mythes arthuriens, LE ROI ARTHUR peine parfois à incarner les émotions des personnages et ce en dépit de jolies prestations d’acteurs. Ritchie survole même certaines scènes dont on aurait aimé qu’elles durent davantage – et qui, chez d’autres, auraient constitué un film entier, comme le voyage d’Arthur dans les Darklands. Refusant toute pause, LE ROI ARTHUR perd en dramaturgie. Il n’en demeure pas moins que le regard de Guy Ritchie sur son univers déborde d’intentions. En faisant vivre LE ROI ARTHUR sur une vibration très physique, Guy Ritchie signe un film de cris et de transe aux élans expérimentaux qui cherche – et réussit souvent – à s’affranchir des codes de narration traditionnelle. Dans le paysage contemporain du blockbuster, LE ROI ARTHUR est hors norme, un OVNI hargneux à la personnalité affirmée avec irrévérence.

De Guy Ritchie. Avec Charlie Hunnam, Jude Law, Astrid Bergès-Frisbey, Djimon Hounsou. Royaume-Uni/États-Unis. 2h06. Sortie le 17 mai

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