UNDERCOVER : chronique

02-01-2019 - 09:22 - Par

UNDERCOVER : chronique

L’histoire vraie d’un ado utilisé par le FBI et les Stups dans leur combat contre le crack. Pas franchement original, mais plutôt solide.

 

Detroit, les années 80 : Rick (Richie Merritt) arpente avec son père (Matthew McConaughey) les foires aux flingues qui pullulent aux États-Unis. Les Wershe achètent et vendent des armes, à la régulière, mais les agents fédéraux Byrd (Rory Cochrane) et Snyder (Jennifer Jason Leigh) les ont dans le collimateur. Alors que Rick commence, sans l’accord de son paternel, à faire affaire avec un gang, se liant même d’amitié avec certains de ses membres, il est contraint par le FBI de devenir informateur. L’histoire est vieille comme le crime et le cinéma a joué un nombre incalculable de fois avec la figure ambivalente de l’indic’. Faire du neuf avec du vieux ? Ce n’est pas l’ambition du film (affublé d’ailleurs du plus anonyme des titres français), qui accepte le classicisme de son pitch sans pour autant abdiquer. Car c’est par les sentiments que Yann Demange (réalisateur du prodigieux ’71, sorti en 2014) va aborder son récit : avant de flirter avec la criminalité, Rick est d’abord un enfant, celui d’un raté que toutes les femmes fuient – y compris sa propre fille (Bel Powley) – et celui d’un Detroit qui n’a pas attendu la crise des sub-primes pour être une ville fantôme, pauvre et désincarnée. Sans foyer solide, sans copain, il va trouver dans les gangs ce sentiment d’appartenance qui a manqué à sa construction. Sa faiblesse, c’est ce sentiment d’abandon chevillé au corps. Il sera même poussé par les Stups à vendre de la drogue pour rapporter les activités narcotiques des ghettos – et se faire un petit pécule en parallèle, histoire de financer le vidéoclub que son père veut ouvrir et donner une raison à sa sœur, crack addict, de rentrer à la maison. Il faut le voir, du haut de ses 15 ans, se rappeler avec elle du temps où « ils étaient gamins », pour voir à quel point Rick est une âme fatiguée prisonnière d’un corps d’enfant – ce que Richie Merritt, mélange de candeur (c’est son premier film) et d’aplomb (il a un sacré talent), personnifie à merveille. La caméra rivée sur son héros contradictoire, Yann Demange réalise un film à la poésie triste, bienveillant avec les erreurs de jeunesse, intransigeant avec le business de la mort, fasciné par l’Amérique comme décor de cinéma. Un thriller comme un coming of age plein de suspense : si les faits sont réels, l’issue n’est pas spécialement connue. Alors on vibre pour Rick. Qu’est-ce que son destin nous dira du déterminisme ? Dommage que le dénouement soit alors traité de manière si précipitée, voire expédiée. Le film aurait pu être encore plus éloquent sur l’Amérique des laissés-pour-compte et des économies parallèles. 

De Yann Demange. Avec Matthew McConaughey, Richie Merritt, Bel Powley. États-Unis. 1h51. Sortie le 2 janvier

3Etoiles

 

 

 

 

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