STAN & OLLIE : chronique

05-03-2019 - 12:57 - Par

STAN & OLLIE : chronique

Au crépuscule de leur carrière, Laurel et Hardy entament en 1953 une tournée des théâtres britanniques. Steve Coogan et John C. Reilly sont superbes.

 

L’ouverture de STAN & OLLIE allie tour de force technique et mise en scène parlante : Stan Laurel et Oliver Hardy, assis côte à côte, discutent dans leur loge. Le sujet de leur conversation n’a aucune importance. La manière dont chacun se reflète dans le miroir de l’autre, reconstruisant ainsi le duo dans chaque moitié de l’image, l’est. Unis, Laurel et Hardy vont le rester dans le long plan séquence qui suit, en mouvement dans les travées d’un studio. Le Hollywood mythique prend forme autour d’eux, bouillonnant, magique. Mais rien ne les désunit, rien ne vient briser ce plan séquence virtuose… jusqu’à l’arrivée du producteur Hal Roach, qui occasionne la première coupe. En termes esthétiques, STAN & OLLIE ne sera jamais vraiment à la hauteur de cette ouverture. Alors que le film revient sur un duo comique mythique et sur une ère – perdue – tout aussi légendaire du cinéma, STAN & OLLIE se révèle malheureusement plutôt paresseux formellement, voire franchement fonctionnel. Rien, dans le découpage ou la lumière, ne vient soutenir le propos sur la manière dont Hollywood, cette machine du divertissement, use, humilie et broie ses artistes ; sur les excuses récurrentes que se donne le système (sur l’état du marché ou la concurrence de nouveaux médias) pour lentement oublier ses idoles, les effacer de l’Histoire et les remplacer par plus jeune, plus moderne et inédit. Bien que tristement lucide sur l’industrie qu’il filme, STAN & OLLIE peine à mettre en scène ces sentiments crépusculaires et mélancoliques si ce n’est en les soulignant – comme dans une musique un peu grossière et annonciatrice. Pourtant, difficile de ne pas se prendre au jeu. Si l’on imagine que, comme dans la plupart des biopics, le scénario romance ou passe rapidement sur certaines zones d’ombre plus problématiques ou complexes de ses héros, STAN & OLLIE parvient à rendre un bel hommage au duo. Tout d’abord en insufflant au quotidien des comédiens des facéties rappelant celles de leurs films (ici, une valise dégringole des escaliers comme le piano de LIVREURS, SACHEZ LIVRER !, par exemple) mais surtout en laissant les rênes à ses deux interprètes, Steve Coogan et John C. Reilly. On connaissait le talent de Reilly pour infuser la comédie dans la tristesse ou la tendresse, mais moins le génie tragique de Steve Coogan, qui livre ici la plus bouleversante prestation de sa carrière, tout en subtile intériorité. Le duo, tout en rendant justice au génie de leurs modèles, surmonte toutes les scories de STAN & OLLIE et émeut sans effort, avec grâce. 

De Jon S. Baird. Avec Steve Coogan, John C. Reilly, Nina Arianda. Grande-Bretagne. 1h37. Sortie le 6 mars

3Etoiles

 

 

 

 

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