LIGHT OF MY LIFE : chronique

11-08-2020 - 09:01 - Par

LIGHT OF MY LIFE : chronique

Après le mockumentaire canular I’M STILL HERE, Casey Affleck passe à la réalisation de fiction, sous haute influence David Lowery et Debra Granik.

 

Dans un monde qui peine à se relever d’une pandémie ayant décimé les femmes, un homme (Casey Affleck) vit depuis dix ans dans la forêt avec sa fille, Rag (Anna Pniowsky), dont il dissimule le genre derrière des oripeaux de garçon. Mais alors qu’elle grandit, des conflits mettent à l’épreuve leur relation. Pour le père se pose la plus délicate des questions : comment protéger Rag tout en la laissant vivre ? Casey Affleck, accusé par le passé de harcèlement par deux femmes, consacre son premier long-métrage de fiction à un monde laissé aux mains des hommes. Des hommes « tristes, seuls et en colère », qui ont « oublié ce qui est bon et important ». Un film où il incarne lui-même un veuf éploré, protégeant sa fille des dangers qu’un monde post-apocalyptique en quête de perpétuation de l’espèce implique. Doit-on souligner l’ironie potentielle de la situation et balayer d’un revers de main la proposition ? L’autre option, si tant est qu’elle soit prise en toute connaissance de cause, vise à adhérer à l’idée du cinéma comme potentiel outil de résilience, de repentance et de pardon. Ou du moins, d’écoute et de discussion. Néanmoins, impossible de visionner LIGHT OF MY LIFE sans penser à « l’affaire Casey Af- fleck » : le film est un livre ouvert. Souvent humble et touchant, parfois didactique, LIGHT OF MY LIFE souligne les intentions du metteur en scène et sa nature probablement expiatoire. À l’image de cette longue séquence où le père discourt de la puberté et du racisme : ses mots, forts d’une écriture précise, ont vraiment du sens dans le contexte dramaturgique. Casey Affleck les joue même merveilleusement, dans une gêne naturaliste sincère. En dépit de quelques maladresses, LIGHT OF MY LIFE ne manque donc pas de pertinence, qu’il trouve souvent dans les silences, dans des détails – ce qu’il dit des repères « genrés » de la société –, dans son appétit d’histoires – que le père raconte à Rag avant qu’elle ne s’endorme –, dans sa manière de créer une tension sans avoir à l’expliquer. Le danger qu’encourt Rag, palpable, écrase réellement le spectateur car la mise en scène, qu’elle soit contemplative ou beaucoup plus sèche, ne dérive vers aucune putasserie ou chantage facile. La musique de Daniel Hart (compositeur de A GHOST STORY), elle, sublime tout, comme pour mieux mettre en lumière tout ce qui manque à ce monde desséché. Armé de la force de son propos et de son indéniable sens du storytelling, Casey Affleck tend alors par moments vers le lyrisme de son ami David Lowery. Un premier long (de fiction) prometteur.

De Casey Affleck. Avec Anna Pniowsky, Casey Affleck, Elisabeth Moss. États-Unis. 1h59. Sortie le 12 août

4Etoiles

 

 

 

 

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