WENDY : chronique

22-06-2021 - 17:36 - Par

WENDY : chronique

Jumeau des BÊTES DU SUD SAUVAGE, ce grand film d’aventures inspiré de « Peter Pan » est une célébration bouleversante de l’enfance.

 

Peu importe les HOOK, les PAN ou les dessins animés que le cinéma a produit avec plus ou moins de discernement, « Peter Pan » a toujours été ce conte retors sur la dictature de l’insouciance et la trahison de l’âge adulte. Souvent adaptée dans une obsession des péripéties – et une féérie des plus malaisantes –, la mythologie de J.M. Barrie trouve avec WENDY l’écrin très divertissant du film d’aventures contemplatif, raconté à travers les yeux d’une petite fille de Louisiane. Wendy habite au-dessus du diner tenu par sa mère, le long d’une voie ferrée. Une nuit, sur un train sous sa fenêtre, un petit garçon prénommé Peter l’invite elle et ses frères à le rejoindre, direction l’inconnu. Ni une ni deux les enfants se font la malle jusqu’à Neverland, où Peter et ses recrues ne pensent qu’à s’amuser dans l’immense terrain de jeu qu’est leur île, sous la protection bienveillante de Mère, une créature sous-marine. Mais qui est donc ce vieux monsieur qui ne cesse de répéter à Peter qu’il est toujours Buzzo ? Il habite de l’autre côté de l’île, un endroit dont Peter refuse d’entendre parler. Comme LES BÊTES DU SUD SAUVAGE, WENDY dresse le portrait de l’enfance, comme l’âge béni de la communion parfaite avec la nature. L’infiniment petit et l’infiniment grand, un rapport charnel et fraternel, comme un pacte tacite. Hier, Hushpuppy face au méga-phacochère, après une tempête dévastatrice ; aujourd’hui Wendy proche de Mère, monumental cétacé luminescent comme le dernier témoignage du Big Bang. Benh Zeitlin, tel un Terrence Malick animiste, va chercher l’illumination et l’extase dans l’amour, celui qui est en chacun de nous, mais aussi, dit-il, en chaque animal et en chaque chose. L’étincelle du beau ne meurt que lorsqu’on fait l’expérience de la peine, quand on prend conscience de la douleur, ce sentiment d’adulte. Alors Peter, petit bonhomme comme une vieille âme, perd toute sagesse et devient ce petit tyran de la cause innocence dès lors qu’il voit un enfant souffrir. Même lorsque le film durcit le ton, même lorsqu’il se confronte à des sujets plus durs comme la cruauté des Hommes ou la mort, Benh Zeitlin l’enveloppe d’une telle poésie et d’un tel romanesque que jamais il ne succombe à l’inconfort rébarbatif du conte. Avec son décor incroyable, ses bateaux pirates naufragés, ses grottes et ses lianes, sa musique festive et déchirante, Benh Zeitlin fait retomber le public à l’âge si intuitif de l’enfance. De la photo baignée de lumière, à la spontanéité de ses jeunes acteurs, il crée un spectacle de féérie, phénoménal, foudroyant. Quelque chose de mystérieux et de simple, pourtant. Du cinéma unique et fabuleux qui ne ressemble qu’à lui-même. 

De Benh Zeitlin. Avec Devin France, Lowell Landes, Shay Walker. États-Unis. 1h52. En salles le 23 juin

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