NIGHTMARE ALLEY : chronique

21-01-2022 - 13:49 - Par

NIGHTMARE ALLEY : chronique

Les monstres de Guillermo del Toro reprennent forme humaine mais l’étude de la cruauté du monde reste la même.

 

Mis à part un fœtus qui flotte dans le formol, son unique œil scrutant, curieux et placide, la comédie humaine autour de lui, il n’y a pas de monstre dans le nouveau film de Guillermo del Toro. Pas besoin, quand la créature la plus fascinante à étudier dans NIGHTMARE ALLEY est en fait un homme, tout ce qu’il y a de plus faillible, d’égoïste, d’avide de pouvoir. Quand il débarque dans un cirque, avec ses diseurs de bonne aventure et ses femmes-araignées, Stanton Carlisle (Bradley Cooper) découvre l’art du mentalisme, de la transmission de pensée, de la lecture de l’esprit. Initié par Zeena (Toni Collette) qui lui confie le livre des secrets de son défunt mari, il se familiarise surtout avec l’art de faire illusion, de mentir et de tricher. Une fois qu’il en maîtrise les ficelles, il propose à Molly (Rooney Mara) de partir s’installer à New York où ses aptitudes « paranormales » pourraient lui rapporter beaucoup d’argent. Sur place, alors qu’il rencontre la psychiatre Lilith Ritter (Cate Blanchett), ses ambitions pourraient bien le perdre. Ce qui a l’air d’être un pitch qui ne dit pas grand-chose pourrait en fait résumer les trois quarts de NIGHTMARE ALLEY. Attention, il ne s’agit pas pour autant de spoilers tant l’intérêt de la première partie du film, rurale, se trouve surtout dans l’étude de caractère de Stanton, la  mise en place psychologique absolument nécessaire au déroulement de ce récit mental et vénéneux. La seconde partie du film, plus urbaine, existe peut-être davantage grâce à ses péripéties (une série de mauvaises décisions et un jeu de dupes)… qui ne l’empêchent malheureusement pas d’être hautement prévisible. Même sans avoir lu le roman de William Lindsay Gresham, ou vu LE CHARLATAN (première adaptation datant de 1947), la trajectoire du long métrage est balisée par les codes précis du film noir. Les passes d’arme entre Carlisle et la psychiatre, la soif de manipulation, l’infatuation du héros et sa déchéance… tout se déroule comme un manuel explicatif pour enfants. C’est d’ailleurs le film le plus « familial » de son réalisateur, qui prend soin de capter les rares percées d’horreur soit dans l’ombre, soit de loin. Bien sûr, le film est sublime. Armé de références à Hitchcock, réalisé par un exégète des lumières du noir, doté d’un budget confortable qui est tout entier sur l’écran, NIGHTMARE ALLEY – dont on pourra bientôt découvrir une version Noir & Blanc – flatte le regard, sans faute de goût, sans risque non plus. C’est à se demander où finit l’exercice de style et où démarre le cinéma de Del Toro, celui si singulier, qui n’appartient qu’à lui ? 

De Guillermo del Toro. Avec Bradley Cooper, Cate Blanchett, Toni Collette. États-Unis. 2h31. En salles le 19 janvier

3Etoiles

 

 

 

 

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