Cannes 2022 : LA DÉRIVE DES CONTINENTS (AU SUD) / Critique

22-05-2022 - 10:05 - Par

Cannes 2022 : LA DÉRIVE DES CONTINENTS (AU SUD) / Critique

De Lionel Baier. Quinzaine des Réalisateurs.

 

C’est en 2006 que Lionel Baier a lancé sa tétralogie filmique sur les points cardinaux. Après l’hésitant COMME DES VOLEURS (À L’EST) et le gentillet / foutraque LES GRANDES ONDES (À L’OUEST), le cinéaste suisse continue son exploration de l’Homme et de l’Europe avec LA DÉRIVE DES CONTINENTS (AU SUD). Deux entités comme deux corps, l’un de chair et d’os, l’autre géopolitique, en mouvements, dont l’âme est à réparer et les façons à interroger. Dans ce nouvel opus, cela passe par « Nathalie Adler en mission pour l’Union Européenne en Sicile. Elle est notamment chargée d’organiser la prochaine visite des chefs d’états français et allemand dans un camp de migrants. » En parallèle, il y a Albert, son fils, « militant engagé auprès d’une ONG, qui débarque sans prévenir alors qu’il a coupé les ponts avec elle depuis des années ». Famille de sang, famille d’alliance : tout le monde est au bord de la crise de nerfs dans cette comédie faussement légère où les dialogues ne sauvent que les apparences. Car il est bien question de non-dits ici, et surtout de non-écoute. Une mère qui n’a pas su prendre en charge la colère de son fils à vif, un fils qui n’a pas su comprendre les besoins de sa mère démissionnaire ; une partie de ping-pong à différente échelle se joue entre le duo parent-enfant et le vieux continent européen qui se place en héros/héraut sans jamais se demander quelle est sa part de responsabilité dans le drame des migrants. Souvent drôle quand il pointe l’absurdité de la bureaucratie européenne et ses réflexes démagos, LA DÉRIVE DES CONTINENTS (AU SUD) sait aussi faire mouche lorsqu’il laisse ses personnages tomber le masque afin de nous laisser entrevoir leurs cœurs chavirer. Pour cela, il peut compter sur un casting de choix mené avec talent et rythme par la toujours impeccable Isabelle Carré et Théodore Pellerin. Mais Lionel Baier l’emporte définitivement quand il ne fait pas mystère de notre impuissance, nous pauvres et fragiles êtres vivants. Les plaques tectoniques bougent et s’entrechoquent, les voies de la Terre sont impénétrables et penser que l’on a ne serait-ce qu’une once de contrôle est une erreur, humaine, mais fatale. Ce n’est pas pour rien que le film se déroule un certain mois de février 2020…

De Lionel Baier, avec Isabelle Carré, Théodore Pellerin, Ursina Lardi. Suisse / France. 1h29. En salles le 31 août. 

 

 

 

 

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