Cannes 2022 : GOD’S CREATURES / Critique

De Anna Rose Holmer & Saela Davis. Quinzaine des Réalisateurs

 

Il y a quelque chose de bibliquement malsain dans le deuxième long-métrage du duo de réalisatrices Anna Rose Holmer et Saela Davis, GOD’S CREATURES, comme une parabole qui aurait mal tourné. Une sensation de crucifix retourné. La violence sourde mais imparable du voile qui se déchire. Le quotidien d’Aileen ressemble à celui de toutes les femmes de ce petit village sans nom d’Irlande : on se lève, on travaille à la poissonnerie, on se débarbouille comme on peut et on passe au pub avant de dormir. Ad lib. Un quotidien sublimé par une photographie splendide où l’on a presque l’impression de goûter le sel de la mer et de sentir les embruns sur sa peau. Sauf qu’un jour, alors qu’on enterre l’un des fils du bourg qui s’est noyé, c’est celui d’Aileen qui fait son retour, comme revenu d’entre les morts après des années d’absence. Le quotidien s’illumine pour cette femme endormie réveillée par son prince charmant de fils. Mais l’est-il vraiment, charmant ? Tout indique que non mais le sujet de GOD’S CREATURES, c’est Aileen et le chemin de cette mère vers la fin du déni, vers une insupportable vérité. Et quand cette Aileen est jouée par Emily Watson, dont le regard habité perce le cœur, c’est forcément bouleversant. Mais malheureusement, autour d’elle le reste s’effondre. Si les autres membres du casting, dont les récentes révélations Paul Mescal (NORMAL PEOPLE) et Aisling Franciosi (THE NIGHTINGALE), sont également à la hauteur de la Reine Watson, les dialogues lourds, la réflexion agressivement subtile autour de la maternité et de la parole féminine ainsi que la musique sur-explicative noient le film sous des intentions, sûrement louables, mais inabouties et contradictoires. Vraiment dommage.

De Anna Rose Holmer & Saela Davis. Avec Emily Watson, Paul Mescal, Aisling Franciosi. Irlande / Royaume-Uni. 1h36. Prochainement