REBEL : chronique

31-08-2022 - 14:24 - Par

REBEL : chronique

En dépit des maladresses, REBEL est un vrai geste de cinéma, en partie musical, accompli avec panache.

 

Le succès mondial de BAD BOYS 3 aurait pu les rendre paresseux. Et si Hollywood a bien compris leur talent – depuis, ils ont tourné deux épisodes de MS MARVEL et le téléfilm BATGIRL –, Adil El Arbi et Bilall Fallah, eux, ont décidé de ne pas jouer la facilité. Avec REBEL, ils reviennent en Belgique et s’attaquent à un sujet délicat et le font avec une ambition assez folle. Rappeur, Kamal quitte Molenbeek et se rend en Syrie pour venir en aide aux populations civiles. Sur place, il va être embrigadé de force par l’organisation État islamique. En Belgique, son petite frère Nassim devient la proie de recruteurs de Daesh… Il faut être de sacrées têtes brûlées, et de sacrés cinéastes, pour se jeter dans un tel sujet comme le font El Arbi et Fallah : en cherchant à tout prix à faire du cinéma. Avec de l’ampleur, voire du spectacle, sans pour autant perdre de vue la dimension sociale, politique, émotionnelle et morale de leur entreprise. Celle-ci n’est d’ailleurs pas totalement réussie. L’interprétation pêche parfois dans les moments les plus denses. Certains dialogues, parfois trop écrits ou didactiques, expliquent ou surlignent ce que l’image avait parfaitement transmis. Les chansons extra diégétiques qui viennent commenter l’image, dans leur émotivité à fleur de peau, entrent en conflit avec la dureté du récit. Pourtant, REBEL reste de ces expériences si peu communes qu’elle est impossible à balayer. Car en regard de ces maladresses, El Arbi et Fallah accomplissent aussi un geste de cinéma qui confine parfois au sublime et mène à la sidération. Trois numéros musicaux entre rap, pop et danse contemporaine, d’une totale maîtrise de mise en scène, content l’indicible, expliquent la rage et les racines du mal, viennent rebattre les cartes de tout ce que l’on pourrait attendre d’un tel film. Dans ces moments, REBEL arrive au cœur de son sujet et transmet une foule d’idées et d’émotions. Un sens visuel (et donc narratif) que le duo met aussi à profit dans des séquences de guerre où, sans tomber dans le voyeurisme, ils mettent en scène le chaos avec énergie et virtuosité, projetant le spectateur au côté des personnages. REBEL ne détourne le regard d’aucune horreur, il la déconstruit même parfois avec talent – une hallucinante scène de tournage d’exécution, pensé et répété –, et n’en perd pourtant jamais son sens du romanesque. En ressort un objet filmique étrange, que l’on peine à totalement appréhender tant il danse sur un fil ténu mais qui, dans le même temps, dénote d’une témérité, d’une sincérité et d’un talent dont on ne peut qu’être admiratif et curieux. 

De Adil El Arbi et Bilall Fallah. Avec Aboubakr Bensaihi, Amir El Arbi, Lubna Azabal. Belgique / France. 2h15. En salles le 31 août

4Etoiles

 

 

 

 

Pub
 
 

Les commentaires sont fermés.