Cannes 2023 : IN FLAMES / Critique

De Zarrar Khan. Quinzaine des cinéastes.

 

Bien qu’il se révèle parfois un peu trop appliqué, IN FLAMES brille par son ambiance et sa maîtrise des codes du cinéma de genre.

Lorsqu’un inconnu l’agresse sans raison alors qu’elle est au volant de sa voiture, Mariam, étudiante, hésite à porter plainte. Bien qu’elle soit la petite fille d’un commissaire de district récemment décédé, elle se demande ce que cela pourrait bien changer. « Ça changera tout », lui rétorque Asad, ami d’une amie, allié face au patriarcat. Dans cette simple hésitation de Mariam à effectuer un geste qui devrait être anodin et facile, IN FLAMES acquiert une universalité immédiate. Le film ne nie toutefois pas sa spécificité et dresse scène après scène le portrait d’un pays, le Pakistan, et d’une ville, Karachi, à force de fugaces moments de vie ou de petites répliques, entre insultes et réprimandes, aussi banales qu’agressives – « Asseyez-vous convenablement ! On n’est pas à Bollywood ! », dit un passant à Mariam et Asad assis côte à côte sur un banc public. Avec une mise en scène qui ménage autant un certain naturalisme que des détours plus stylisés, Zarrar Kahn établit une chape de plomb rapidement cauchemardesque sur laquelle le spectateur n’a aucune prise – décuplant ainsi ses effets. Cette épée de Damoclès qui pèse sur Mariam n’a pas de vrai visage, elle s’impose comme une absurdité indicible dont on ne saisit pas les tenants, les aboutissants ou les raisons. Cette ambiance oppressante, très maîtrisée au point d’en apparaître parfois un peu trop appliquée, se joue à la fois dans les manœuvres d’un oncle que dans les actes graveleux d’inconnus – un homme se masturbe devant Mariam –, dans les apparitions d’une silhouette fantomatique dont les contours se dévoilent peu à peu ou dans un travail très précis sur le son – un bruit métallique récurrent, menaçant et inquiétant. Dérivant peu à peu vers le fantastique, allégorie évidente d’un cauchemar pourtant bien réel dont Mariam et sa mère cherchent l’issue, IN FLAMES a tout compris du cinéma de genre comme outil d’excavation de peurs primales ou plus contemporaines. Un cinéma dont Khan connaît parfaitement les codes et dont il contrôle avec fermeté les effets.

De Zarrar Khan. Avec Ramesha Nawal, Bakhtawar Mazhar, Omar Javaid. Pakistan / Canada. 1h38. Prochainement