Cannes 2023 : LES FILLES D’OLFA / Critique

24-05-2023 - 14:19 - Par

Cannes 2023 : LES FILLES D’OLFA / Critique

De Kaouther Ben Hania. Sélection officielle, compétition

 

Jouant des vertiges du cinéma, la réalisatrice de la BELLE ET LA MEUTE reconstitue et interroge la relation d’une mère et ses filles. Un VIRGIN SUICIDES d’aujourd’hui.

Le dispositif est simple mais vertigineux. L’histoire d’un tournage vu par celles dont on raconte la vie. Mère tunisienne protectrice, Olfa a accepté de dire son histoire et celle de ses quatre filles à la réalisatrice Kaouther Ben Hania. Mais pour la mettre en images, il faut la reconstituer. Alors, des actrices viennent soudain jouer les doublures, combler les manques, jouer ce qui ne peut être décemment revécu. De ce vertige entre témoignage et fiction, la réalisatrice tire le meilleur. Car l’histoire des FILLES D’OLFA est aussi celle d’un regret, d’une violence maternelle, d’une peur dont les conséquences seront terribles. Alors, à travers la mise en abyme, les scènes rejouées, interrogées, quelque chose se révèle. Face aux absentes, les présentes (Olfa et ses deux cadettes) interrogent le passé, tentent de comprendre comment le pire a pu arriver. Refaire les gestes et discuter des mots réveille les fantômes et la caméra – d’une précision de mise en scène impressionnante – capte cet exorcisme familial avec une beauté de cinéma hypnotique. Petit à petit, la vérité refait surface et lorsqu’enfin, le cœur noir et blessé de ce gynécée révèle toute son horreur, la réalisatrice laisse alors place à l’archive, à la réalité brute et aux larmes qui vont avec. Un film singulier, brillamment mené qui offre un regard intime et politique sur la condition des femmes aujourd’hui. Le poids d’être mère, le fardeau d’être fille.

De Kaouther Ben Hania. Avec Hend Sabri, Olfa Hamrouni, Eya Chikahoui. Documentaire. France/Tunisie. 1h50. En salles le 5 juillet

 

 

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