Cannes 2019 : PERDRIX / Critique

24-05-2019 - 18:20 - Par

Cannes 2019 : PERDRIX

De Erwan Le Duc. Quinzaine des Réalisateurs.

 

Synopsis officiel : Pierre Perdrix vit des jours agités depuis l’irruption dans son existence de l’insaisissable Juliette Webb. Comme une tornade, elle va semer le désir et le désordre dans son univers et celui de sa famille, obligeant chacun à redéfinir ses frontières, et à se mettre enfin à vivre.

 

Le charme c’est tout ou rien. Mais quand ça marche, ça fait des étincelles. La preuve avec ce premier long iconoclaste et délicat, petite bombe de séduction maligne. En équilibre précaire entre l’intime et le burlesque, Erwan Le Duc joue avec le feu mais réussit à allumer la mèche d’un petit feu d’artifice de légèreté, d’humour et d’élégance. Pure comédie romantique, le film épouse les zigzags d’une famille en crise, d’un monde cloîtré sur lui-même qui par le biais d’une inconnue va apprendre à aimer ses chemins de traverses et sa propre bizarrerie.

D’ordinaire, dans ce type de récit sous inspiration THÉORÈME (un/une inconnu.e débarque et renverse l’ordre moral et social d’un espace), il y a une opposition souvent lourdingue entre l’arrivée fantasque d’un personnage et le monde gris qu’il envahit. Là, intelligemment, Erwan LeDuc réinvente le genre par un burlesque dominant, un monde qui marche littéralement sur la tête, apathique et rigolo. Un commissariat à la Jacques Tati, une mère de famille qui fait le courrier du cœur dans un garage (Quelle idée géniale de faire de Fanny Ardant une voix), un frère fou de vers de terre qui étouffe sa fille en voie d’émancipation (Nicolas Maury dans un contre-emploi émouvant) , des nudistes terroristes, un char d’assaut mal garé, tout un monde décalé qui n’est étrange que dans nos yeux. Comme si l’humour à froid de Bruno Dumont s’était réchauffé à l’élégance mélancolique de Wes Anderson, PERDRIX allie le dur et le tendre avec style. Erwan Le Duc filme le burlesque, l’absurde avec une grande sincérité. Ce n’est jamais « pour faire rire », c’est juste profondément drôle, car inattendu. Comme une nouvelle façon de voir le monde.

Et puis, il y a ce héros, calme, posé qui passe à côté de sa vie. Lunaire mais jamais clownesque, Swann Arlaud révèle ici un potentiel comique et romantique réjouissant. Face à lui, Maud Wyler est une fabuleuse révélation. Drôle, énergique, étonnante, elle est une apparition à chaque plan. C’est beau comme le film accepte d’être simplement une comédie romantique qui raconte comment deux êtres cèdent l’un à l’autre. Dans un monde joyeusement désordonné que le réalisateur a l’intelligence de ne pas vouloir remettre d’aplomb, ces deux personnages se tiennent la main pour sauter à pieds joints dans le grand bain. Stylisé, élégant et surtout très drôle, PERDRIX n’a pas que du charme. Il a aussi du cœur. 

De Erwan Le Duc. Avec Fanny Ardant, Swann Arlaud, Maud Wyler, Patience Munchenbach. France. 1h42. Sortie le 14 août

 

 

 

 

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