DARK PLACES : chronique

08-04-2015 - 08:41 - Par

L’auteure de « Gone Girl », Gillian Flynn, à nouveau adaptée sur grand écran. Mais tout le monde n’est pas David Fincher…

Gillian Flynn, pourvoyeuse officielle de thriller au féminin pour une industrie hollywoodienne en rade d’héroïnes ? C’est ainsi que ça se profile. Après que son troisième roman « Gone Girl » a été adapté par David Fincher (avec le résultat prodigieux qu’on connaît), c’est son deuxième livre, « Dark Places », qui est désormais porté sur grand écran – par le Français Gilles Paquet-Brenner (ELLE S’APPELAIT SARAH). En guise de figure dramatique, Libby Day, enfant rescapée d’une tuerie domestique pour laquelle la justice a enfermé Ben, son frère, en 1985. Vingt-huit ans plus tard, on la retrouve sous les traits d’une jeune femme aux abois (Charlize Theron), qui a trop longtemps vécu aux crochets de la population émue de son sort et généreuse. Quand le président d’un fan club de faits divers (Nicholas Hoult) lui demande de l’aide pour tenter d’innocenter Ben (Corey Stoll), c’est l’appât du gain qui la décide à faire ce douloureux retour en arrière. DARK PLACES est, comme son compère GONE GIRL, monté dans une valse d’allers-retours entre aujourd’hui et la période cruciale où le drame s’est joué. Mais contrairement au film de Fincher, il n’y a pas le prétexte narratif du journal intime qui posait la question du subjectif. Ici, le thriller est plus classique, moins ludique, l’ironie brille par son absence, laissant place à un sérieux exagéré pour ce qui relève d’une série B de luxe. Symbole de ce premier degré ? La « transformation » calculée (et artificielle) de Charlize Theron en cas social complètement dark, t-shirt soigneusement déchiré, jean sali comme il faut, et indéboulonnable moue agressive de la fille « à qui la vie a pas fait de cadeau, tu vois ». Dans l’histoire, dans l’ambiance, DARK PLACES occupe confortablement un terrain connu : le film sudiste cul- terreux. Des mères courage s’échinant à protéger la ferme familiale de la saisie (un rôle confié à Christina Hendricks, qui joue peu ou prou le même personnage dans LOST RIVER), des ex-maris dealers qui viennent troubler le calme retrouvé de leurs ex-familles, des bourgeois qui regardent les pauvres de haut et des ados satanistes qu’on accuse (à tort ? À raison?) de tous les crimes. Mais alors que tout est fait pour sonner faux, une « drôle » de magie opère. Les visages tragiques de Tye Sheridan et de Corey Stoll, incarnant tout deux Ben à deux âges, finissent par fasciner. Eux, les hommes qui veulent être à la hauteur des femmes et qui sont accablés d’être en dessous de tout. Toute résonance avec GONE GIRL n’est pas fortuite, Gillian Flynn étant une formidable romancière de la déception.

De Gilles Paquet-Brenner. Avec Charlize Theron, Nicholas Hoult, Chloë Moretz. États-Unis. 1h54. Sortie le 8 avril

 

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