Cannes 2015 : HITCHCOCK TRUFFAUT / Critique

22-05-2015 - 22:23 - Par

De Kent Jones. Cannes Classics.

Hitchcock / Truffaut. Deux noms mythiques qui, associés l’un à l’autre, renvoient à un non moins légendaire livre d’entretien du Maître du Suspense conduit par le héros de la Nouvelle Vague. Avec le documentaire HITCHCOCK/TRUFFAUT, Kent Jones entend revenir sur l’importance séminale de l’ouvrage qui, en décryptant le style du cinéaste et en traitant ce dernier comme un grand auteur, « a changé l’opinion des gens sur lui », selon Peter Bogdanovich. Jones se paie donc une brochette d’intervenants de luxe (David Fincher, Wes Anderson, James Gray, Paul Schrader, Olivier Assayas, Peter Bogdanovich, Martin Scorsese, Kiyochi Kurosawa, Arnaud Desplechin et Richard Linklater) pour les faire témoigner sur la place qu’ont eus les entretiens entre Hitchcock et Truffaut dans leur cinéphilie et leur apprentissage de la technique cinématographique. Bien que HITCHCOCK/TRUFFAUT fonctionne sur le mécanisme classique et parfois raide ou éculé de l’alternance entre images d’archive, commentaires en voix off et témoignages, le film de Jones vit d’une telle passion pour son sujet qu’il est tout bonnement impossible de ne pas se laisser embarquer dans l’entreprise. Si l’on n’apprend rien de neuf sur le livre « Hitchcock/Truffaut » en lui-même, la description que chaque témoin fait de son rapport à celui-ci passionne. David Fincher, sans doute le plus présent et loquace, confie ainsi l’avoir découvert enfant, sur les conseils de son père cinéphile. James Gray loue la parole « sans prétention » d’Hitchcock. Scorsese parle de « révolution » ayant donné à toute une génération de jeunes futurs réalisateurs américains le désir d’en découdre avec son art. L’amour du cinéma transpire de chaque seconde du film qui, très rapidement, va dériver vers un tout autre sujet. Le documentaire est en effet l’occasion pour les témoins d’analyser eux-mêmes le style d’Hitchcock et apporter leur pierre à l’édifice. Ils allient en quelque sorte leur force pour livrer une espèce de chapitre bonus au livre de Truffaut en décryptant ce qui fait la puissance intemporelle de PSYCHOSE ou SUEURS FROIDES – les deux films particulièrement analysés ici. Fincher se marre en rappelant que Hitchcock, comme lui, ne se souciait guère du confort de ses acteurs. Wes Anderson écarquille les yeux en parlant avec enthousiasme de trouvailles techniques et stylistiques. Souvent drôle, pensé comme une sorte de friandise à déguster entre cinéphiles, ode à un cinéma populaire qui saurait ne pas prendre son public pour un idiot, glorification de la ‘politique des auteurs’, HITCHCOCK/TRUFFAUT se révèle des plus charmants et donne une furieuse envie de se replonger autant dans le livre que dans les films des deux cinéastes.

De Kent Jones. Documentaire. France / États-Unis. 1h20. Prochainement

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