Cannes 2012 : NO / Critique

18-05-2012 - 23:34 - Par

De Pablo Larrain. Quinzaine des réalisateurs.


Synopsis : Lorsque le dictateur chilien Augusto Pinochet, face à la pression internationale consent à un référendum sur sa présidence en 1988, les dirigeants de l’opposition persuadent un jeune et brillant publicitaire, René Saavedra, d’être le fer de lance de leur campagne. Avec peu de moyens et sous la surveillance constante des hommes de Pinochet, Saavedra et son équipe conçoivent un plan audacieux pour remporter le référendum et libérer leur pays de l’oppression.

Du réalisateur chilien Pablo Larrain, on admire la mise en scène d’esthète, le ton stoïque qui cache des opinions tempétueuses, sa photo racée et le fait qu’il remplisse insatiablement son devoir de mémoire. Avec TONY MANERO, puis SANTIAGO 73 POST MORTEM, il dépeignait la vie chilienne sous la dictature de Pinochet, une existence faite de violence, de pertes soudaines et de déshumanisation de la mort. Bouclant sa trilogie avec un opus légèrement plus dynamique, si ce n’est accessible, il livre à la Quinzaine des réalisateurs, NO, cri du cœur de la population chilienne lors du référendum organisé par le parti au pouvoir en 1988 pour savoir si Pinochet était désiré à la tête du pays. Un plébiscite dont l’opposition s’est emparée et qui, dans le film, a confié sa communication à un jeune loup de la publicité, René, incarné par un Gael Garcia Bernal renouant avec les rôles solides qui l’ont fait connaître. Ici tout en charisme et en intensité, il campe un type dont la conscience politique va traverser une parenthèse plus noire, plus inquiétante, loin du confort du grand capital et des spots de pub pour des sodas, alors que, préparant la campagne avec ses « camarades », lui et son jeune fils vont subir la pression de la dictature. Et si notre admiration pour Pablo Larrain n’a pas de borne, on citera autant à l’occasion de NO – toutes proportions gardées, s’il vous plaît – le RÉVÉLATIONS de Michael Mann (pour la préparation underground à l’attaque et les tentatives d’intimidation) ou MAD MEN, pour l’utilisation à toutes les sauces d’arguments marketing (ou la philosophie du « tout s’achète si tu le vends bien »), pour les briefs absurdes et les dialogues non moins drolatiques autour de la consommation idéologique. Le vrai changement, c’est maintenant pour Larrain, qui troque ses plans majestueux pour un format 4/3 et une image vidéo vintage (c’est un ‘message à caractère informatif’, si vous voyez ce qu’on veut dire visuellement). Les plans sont donc cramés, le grain est gros, ce qui n’empêche nullement le film d’être d’une grande beauté. Il faut dire que, quand on a de l’idée, un grand sens du cadre et un don spécial pour la direction d’acteurs, même d’un support merdeux on peut tirer une grande œuvre. D’autant que dans un souci louable de cohérence esthétique, ses plans à lui s’intègrent avec grâce dans la foultitude d’images d’archives qu’il est allé dénicher pour raconter l’histoire d’une victoire populaire pour la démocratie. Non content d’être un film important, il est aussi assez prodigieux.

De Pablo Larrain. Avec Gael Garcia Bernal, Alfredo Castro, Antonia Zegers. Chili. 1h55. Prochainement

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