47 RONIN : chronique

02-04-2014 - 09:17 - Par

Devant la caméra ? De la classe, de la noblesse, de la puissance. Derrière ? Personne de convaincant. Et c’est dommage.

Carl Rinsch, ancien réalisateur de publicités acclamé, a été catapulté à la direction de 47 RONIN, son premier long-métrage, par une industrie persuadée que quiconque peut faire un joli spot hors de prix peut aussi assumer la fabrication d’un blockbuster. La postproduction du film a été semée d’embûches, son budget a été largement dépassé et sa sortie, souvent repoussée. Est-ce une catastrophe pour autant ? Non. Mais il prouve l’inexpérience de Rinsch. Les combats au sabre sont surdécoupés et illisibles, la mise en scène est impersonnelle, les effets spéciaux sont banals. 47 RONIN est aussi schizophrène, déchiré entre le besoin de plaire au plus grand nombre (d’où une séquence très PIRATES DES CARAÏBES dans l’âme) et la déférence à son sujet, son statut de grosse prod’ et son absence totale d’arme de séduction massive. 200 millions de dollars de budget (et plus) et Keanu Reeves et Hiroyuki Sanada (SUNSHINE) en têtes d’affiche ? Un problème commercial. Alors oui, 47 RONIN, illustration d’un monument de la tradition orale, n’est pas du tout le reflet de son ambition. En tant que blockbuster, il est raté ; en tant que film, il n’est pas que ça. Il revient sur les traces de ces fameux samouraïs cherchant à venger leur maître qui, après s’être déshonoré, a dû pratiquer le seppuku. Voilà pour les faits historiques. Cinéma du XXIe siècle oblige, ici, le maître en question a été manipulé par une sorcière, à la solde d’un seigneur ennemi. Les ronins partent à la reconquête de leur statut de samouraïs, avec l’aide d’un « sang mêlé » (Keanu Reeves), orphelin et doté de pouvoirs malins. Ces incartades fantastiques n’entament en rien l’esprit très traditionnel de 47 RONIN. C’est aux codes d’honneur du combat japonais que le film rend hommage. Chaque personnage a une grande dignité ; dans l’implication criante de Keanu Reeves, il y a le respect d’une culture. Avec didactisme (voix off introductive et conclusive) et une poignée de scènes d’une grande noblesse, 47 RONIN veut démocratiser le destin de ces héros d’un autre temps, exalter leurs valeurs. Fallait-il pour cela produire un blockbuster trop cher qui joue sur l’épate visuelle ? Non, car peu importe son caractère ultramoderne, 47 RONIN relève d’un cinéma anachronique, à contre- courant de l’héroïsme pyrotechnique actuel. Le mysticisme créant une certaine distance vis-à-vis de la violence, 47 RONIN peut paraître rond et consensuel mais quel film mainstream se permettrait à notre époque une fin si définitive ? Quelle machine à fric prendrait le risque d’en perdre autant ?

De Carl Rinsch. Avec Keanu Reeves, Hiroyuki Sanada, Asano Tadanobu. États-Unis/Japon. 1h59. SORTIE LE 2 AVRIL

 

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