Cannes 2014 : STILL THE WATER / Critique

20-05-2014 - 18:08 - Par

De Naomi Kawase. Sélection officielle, en compétition.

Synopsis officiel : Sur l’île d’Amami, les habitants vivent en harmonie avec la nature, ils pensent qu’un dieu habite chaque arbre, chaque pierre et chaque plante. Un soir d’été, Kaito découvre le corps d’un homme flottant dans la mer, sa jeune amie Kyoko va l’aider à percer ce mystère. Ensemble, ils apprennent à devenir adultes et découvrent les cycles de la vie, de la mort et de l’amour…

Depuis ses débuts, de SUZAKU à HANEZU en passant par LA FORÊT DE MOGARI (à nos yeux son film le plus marquant), la réalisatrice japonaise Naomi Kawase déploie un cinéma contemplatif où la mort, l’héritage familial et la nature ont une place centrale. Des thèmes qui se retrouvent de nouveau développés dans STILL THE WATER, qui interroge le statut de l’homme face à la mort – du point de vue des vivants, ceux qui restent. Comment accepter le trépas d’un proche ? Comment faire son deuil ? Comment continuer à vivre, à célébrer le vivant lorsque l’on perd une part de soi ? « Pour remplacer la chaleur du corps, il y a la chaleur du cœur. » : voilà la manière dont l’un des dialogues de STILL THE WATER apprend à Kyoko comment surmonter le décès inévitable de sa mère. À des questions universelles ayant traversé l’esprit et l’existence de chaque être humain, Naomi Kawase apporte donc des réponses… ordinaires. L’ordinaire n’empêche certes pas la pertinence, mais le problème de STILL THE WATER est qu’il n’accorde jamais son propos – d’une grande simplicité – à son traitement – faussement complexe. Apparaît donc un désagréable paradoxe à l’écran : un propos honnête, un véritable élan du cœur, est amoindri par une forme inutilement élusive, interprétative et ne cherchant guère l’accessibilité. Comme si la cinéaste, pour s’excuser de livrer un sens de la vie somme toute banal, cachait son cœur derrière son intellect. Malheureusement, hormis quelques séquences esthétiquement envoûtantes – un typhon balayant l’océan et le rivage ; une nage aérienne dans les fonds marins – et quelques scènes à l’humanité spontanée – dont une discussion de famille autour du petit-ami de Kyoko – STILL THE WATER peine à fasciner ou à émouvoir. D’aucuns diront que STILL THE WATER n’est que de la philosophie de comptoir digne d’une grande enseigne d’art de vivre. D’autres qu’il s’agit d’une rêverie soporifique. En fait, le constat est donc bien pire : STILL THE WATER n’assume pas sa naïveté. Un peu comme un enfant de dix ans userait de mots compliqués pour un poème de fête des mères, quand il lui aurait suffi de dire je t’aime. Accessoirement, et en forme de post-scriptum : STILL THE WATER a l’outrecuidance de se croire suffisamment important pour imposer au spectateur une scène interminable et cruelle d’agonie animale (que l’on soupçonne réalisée sans trucages), juste pour prouver l’inéluctabilité du cycle de la vie. On est peut-être un peu simplets, mais on préférait la démonstration faite par Mufasa dans LE ROI LION.

De Naomi Kawase. Avec Nijiro Murakami, Jun Yoshinaga, Miyuki Matsuda, Tetta Sugimoto. Japon. 1h59. Sortie le 17 septembre.

Pub
 
 

Les commentaires sont fermés.