Les trafiquants de drogue ne sont pas tous de gros violents, nez dans la coke et mitrailleuse à la main. Avec MR. NICE, Rhys Ifans se glisse avec passion dans la peau d’Howard Marks, le dealer le plus cool de l’histoire anglaise.
Des bootleggers de la Prohibition aux trafiquants de came des années 70 et 80, le cinéma ne retient souvent qu’un archétype rabâché, mais sans doute réaliste : celui du malfrat colérique et patibulaire, dont on ne soutient pas le regard sans se faire péter les jambes, et qui finit ses jours entre quatre murs. Ou quatre planches. Applaudissons donc la venue sur grand écran de MR. NICE, biopic de Howard Marks, petit prolo gallois qui, lors de brillantes études à Oxford à la fin des années 60, découvre le haschich et finit par en devenir presque par hasard l’un des plus gros importateurs d’Europe. D’un point de vue purement narratif, MR. NICE ne propose rien de révolutionnaire, et la trame générale n’offre donc aucune surprise. D’un passage obligé à un autre, on navigue globalement en territoire connu et balisé. Pourtant, les deux heures que dure le film ne paraissent jamais poussives ou ennuyeuses, car Howard Marks est suffisamment iconoclaste pour surprendre et maintenir l’intérêt à flot. À mi-chemin entre un James Bond rock’n roll et laid back, et un arnaqueur de grand chemin, le trafiquant affiche un destin et une audace qui offrent au film de sacrés bons moments de rigolade. Au point que si MR. NICE n’était pas un film biographique adapté des mémoires de Marks, on aurait sans doute peine à croire au scénario. Qu’il s’allie à un terroriste de l’IRA vindicatif et amateur de porno zoophile – campé par un David Thewlis exceptionnel –, qu’il se fasse passer pour un agent secret de Sa Majesté afin d’échapper aux poursuites ou qu’il fasse témoigner de prétendus espions mexicains à son procès, le personnage de Marks est plus Monty Python que Tony Montana. Cet aspect quasi parodique, déjà porté avec brio par Rhys Ifans, le cinéaste Bernard Rose l’exploite aussi à travers une réalisation inventive qui accompagne le récit et se joue de toute nostalgie : changement de ratios de l’image, passage progressif du noir et blanc à la couleur, caméra se faisant peu à peu mobile… Et l’on ne parle pas de ces scènes parfois kitschissimes où les acteurs évoluent au sein d’images d’archives, à la manière de FORREST GUMP. Cette fraîcheur assure toute la sympathie du public à Marks, observé avec bienveillance mais aussi nuance, via la relation complexe qui l’unit à son épouse Judy (Chloë Sevigny, impeccable, comme toujours). Si bien que l’on finit par rêver que, si caïds il doit y avoir, puissent-ils prendre exemple sur ce MR. NICE plutôt que sur SCARFACE.
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