Le scénariste David Koepp signe son meilleur film de réalisateur : un thriller totalement vain et délicieusement idiot porté par des performances flamboyantes de Joseph Gordon-Levitt et Michael Shannon.
Wilee est coursier à vélo à New York. Et dans son métier, c’est lui le meilleur : casse-cou, ridant sur un engin décrépi et dénué de freins (« À chaque fois que j’ai failli me tuer, c’était à cause des freins », dit-il), il frôle la mort à chacune de ses courses. Cette fois, le danger va se faire encore plus prégnant. Alors qu’il récupère une enveloppe à délivrer en 90 minutes, il se retrouve traqué par Bobby Monday, un flic corrompu et colérique, qui espère lui en subtiliser le contenu, qui pourrait régler ses dettes. Le pitch de PREMIUM RUSH n’a a priori rien de passionnant, si ce n’est qu’il promet une avalanche de cascades cyclistes dans les rues les plus bondées du monde occidental. David Koepp, scénariste décisif de quelques-uns des plus gros succès de ces vingt dernières années (de JURASSIC PARK à SPIDER-MAN en passant par MISSION : IMPOSSIBLE), parvient à ce titre à maintenir l’intensité de PREMIUM RUSH avec un réel talent, trouvant sans cesse le moyen de chorégraphier ses poursuites avec une énergie et un dynamisme relayant à merveille le sentiment de vitesse et de danger. Le tout sans tomber dans l’épilepsie visuelle. On lui reprochera juste ses effets de manche extrêmement redondants, tout droit sortis de Google Earth et Google Maps, qui lui servent à situer ses héros sur des cartes en 3D de la Grosse Pomme. On sera moins enthousiaste quant au récit même de PREMIUM RUSH. Car, s’il affiche au départ une utilité toute relative – ce qui semblait parfaitement idoine – Koepp dérive peu à peu vers un propos se voulant sérieux et/ou politique. En effet, le contenu de l’enveloppe que balade Wilee pourrait bien permettre de sauver la vie d’un enfant chinois. Dans ce pan angélique, PREMIUM RUSH perd une partie de son efficacité, le spectateur étant bombardé d’enjeux émotionnels croqués avec un simplisme ne rendant absolument pas service au message qu’ils véhiculent. Portés par un pitch et un univers volontairement anodins, impossible de voir le propos de Koepp et la finalité du scénario prendre suffisamment chair. Heureusement, le cinéaste a deux armes de destruction massive pour permettre à PREMIUM RUSH de demeurer un spectacle hautement appréciable : Joseph Gordon-Levitt (Wilee) et Michael Shannon (Monday). Profitant de la nouvelle célébrité mondiale du premier, obtenue avec INCEPTION et THE DARK KNIGHT RISES, PREMIUM RUSH finit de l’iconiser. JGL parvient ainsi à faire de l’un de ses rôles les moins denses et intéressants une petite boule de nerfs fascinante, sorte de badass du quotidien absolument charmant et charismatique. Quant à Shannon, il est sans conteste la raison principale de se laisser convaincre par PREMIUM RUSH. C’est simple : rarement aura-t-on vu un comédien cabotiner avec un tel entrain et un tel brio depuis… Nicolas Cage. Chargé de donner vie à un personnage de flic borderline digne d’un Bad Lieutenant mainstream, Shannon livre une performance totalement folle, ne lésinant jamais sur la grandiloquence (entre cris, roulements des yeux dans ses orbites, grands gestes sur appuyés) et tirant parti avec délectation de dialogues totalement ridicules (« Je poursuis un coursier à vélo, wouhou ! » ou notre préféré « Je vous rejoins, j’ai oublié mes balles »). Grâce à lui et une poignée de personnages secondaires drolatiques (un flic à vélo, et un coursier imbu de sa personne qu’on aimerait claquer à chacune de ses apparitions), PREMIUM RUSH peut afficher sans complexe son idiotie et sa vacuité, et devenir pleinement ce qu’il est vraiment : une série B sans aucune autre ambition que de divertir de la façon la plus directe et plaisante qui soit.
De David Koepp. Avec Joseph Gordon-Levitt, Michael Shannon, Dania Ramirez. États-Unis. 1h31. Sortie le 5 septembre
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