Retour en comédie et en poésie sur les coulisses de la célèbre rencontre entre le King et le 37e Président des États-Unis.
Quand la réalisatrice Liza Johnson évoque le « télescopage absurde et comique entre l’icône du rock la plus charismatique au monde et le président américain sans doute le moins rock’n’roll qu’on ait jamais eu », elle saisit là toute la promesse d’ELVIS & NIXON. Un choc entre figures tutélaires américaines, entre un chanteur que tout le monde aime et un politique qui divise. Pourtant, les deux partagent l’idée selon laquelle la grande Amérique vit sous la menace d’un monstre à trois têtes : les communistes, les hippies et la drogue. Elvis écrit à Nixon et a deux requêtes : le rencontrer dans le bureau ovale et être promu « federal agent at large », soit un titre imaginaire de « super-agent infiltré ». L’Histoire a noté que cette rencontre avait eu lieu ; ELVIS & NIXON remplit les blancs, sans grand style ni grandes idées de mise en scène, mais avec une imagination débordante… Ou peut-être est-on en deçà de la réalité. Car le film est dingue, fou d’amour pour un pays fait d’idoles à adorer, de sosies rigolos et d’anecdotes bigger than life. Il y a le plaisir non feint de confier à l’impressionnant Michael Shannon la relecture d’Elvis. Un King au carré, déchiré entre le petit garçon de Memphis qu’il était et ce personnage de fiction. Un Elvis incapable de distinguer la réalité du mirage lorsqu’il tente de persuader Nixon qu’être expert en costumes de scène fait a fortiori de lui le candidat idéal pour infiltrer les « cocos ». Le film nous fait partager le délire inoffensif mais déchirant d’un homme qui s’est élevé au-dessus des hommes, d’un être suprême qui salue et bénit les simples mortels d’un petit geste de la main. Et quand cet Elvis divin, terriblement seul, veut faire le bien pour son pays, il se heurte au pragmatisme crasse. Pendant une heure et demie, Elvis erre sur notre Terre, s’inquiète de notre sort et cherche des amis, espérant rendre aux États-Unis ce que les États-Unis lui ont donné. « Qui a organisé ça ? », s’insurge Nixon face aux deux conseillers qui ont vu dans l’intérêt d’Elvis pour le président une aubaine politicienne. Il ne voit pas que l’icône, qui vomit sur Woodstock et crache sur les Beatles, peut lui prêter un peu de sa popularité. Et Michael Shannon de taper dans le dos de Kevin Spacey, pour un duo de cinéma anthologique. En creux, il y a un deuxième film, porté par Alex Pettyfer et Johnny Knoxville, sur la manière dont Elvis régissait la vie des autres, rien que par sa présence. Avec de grands pouvoirs viennent de grandes responsabilités, disent les comics : Elvis, super-héros bouleversant (mais peut-être n’est-ce qu’une illusion).
De Liza Johnson. Avec Michael Shannon, Kevin Spacey, Alex Pettyfer. États-Unis. 1h26. Sortie le 20 juillet
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