BRIMSTONE : chronique

22-03-2017 - 09:58 - Par

BRIMSTONE : chronique

Dakota Fanning et Guy Pearce s’affrontent dans un vrai/faux western brillant et politique.

Brimstone-PosterDans l’Ouest américain de la fin du XIXe siècle, Liz, jeune femme muette, voit son existence bouleversée par l’arrivée d’un mystérieux prêcheur… Troisième film du néerlandais Martin Koolhoven, BRIMSTONE est une œuvre singulière et importante à plus d’un titre. Singulière par sa structure puisqu’à la manière d’un IRRÉVERSIBLE, le film déroule à rebours les tenants et aboutissants d’une longue traque qui puise ses racines dans l’innommable. Mais ce qui interpelle surtout dans BRIMSTONE, c’est son statut totalement assumé de western féministe et militant. À l’instar du déjà très progressiste mais mal nommé SHÉRIF JACKSON, BRIMSTONE se réapproprie les codes du western pour les décliner au féminin singulier puis pluriel. Mais là où le revenge movie avec January Jones se servait du corps de la femme comme objet de vengeance, BRIMSTONE en fait un enjeu de pouvoir. Car que raconte le film sinon la lutte d’une jeune fille devenue femme pour reprendre ses droits sur son corps convoité par un homme aux intentions aussi troubles que dangereuses ? À travers le combat entre Liz et son bourreau, c’est bien le traitement réservé aux femmes dans une société en pleine mutation qui est mis en exergue. Ce n’est pas un hasard si BRIMSTONE place son action en pleine fin du XIXe siècle avec en toile de fond l’immigration hollandaise. Ici, il est autant question de colonisation de la terre que du corps de la femme. Plus qu’un western, BRIMSTONE est un film politique tant par ses thématiques que par l’image qu’il renvoie d’une conquête aux atours moins romancés, plus malsaine. Habité par une violence sourde mais extrême, BRIMSTONE ne ménage jamais vraiment le spectateur, au contraire, il prend un cadre familier (l’Ouest américain) pour mieux implanter une forme d’inconfort qui sera diffus durant plus de deux heures. Un malaise que renforcent la mise en scène brillante de Koolhoven, sa photo aux sublimes tons tour à tour glaciaux et cendrés, ainsi que la partition spectrale d’un Junkie XL particulièrement inspiré. À cela s’ajoute une distribution parfaite portée à bout de bras par une Dakota Fanning d’une dignité absolue en jeune femme luttant perpétuellement pour sa liberté. Incarnation de ce que l’intégrisme religieux peut avoir de plus dangereux et pervers, Guy Pearce se révèle absolument terrifiant en prêcheur psychopathe renvoyant autant au révérend Harry Powell de LA NUIT DU CHASSEUR qu’au glaçant Max Cady des NERFS A VIF. Autant d’atouts qui font de BRIMSTONE une œuvre à part, une odyssée terrifiante au cœur de l’âme humaine dans ce qu’elle peut avoir de plus sombre.

De Martin Koolhoven. Avec Dakota Fanning, Guy Pearce, Kit Harington. Pays-Bas/Allemagne/France. 2h25. Sortie le 22 mars

4Etoiles

 

 

 

 

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