THE CAPTAIN – L’USURPATEUR : chronique

20-03-2018 - 20:28 - Par

THE CAPTAIN - L’USURPATEUR : chronique

Après avoir dirigé des blockbusters pour Hollywood, Robert Schwentke revient en Allemagne et signe un film radical. Épatant.

Six films américains – et pas la crème. FLIGHT PLAN, HORS DU TEMPS, RED, R.I.P.D., deux DIVERGENT… L’Allemand Robert Schwentke se pépérisait gentiment à Hollywood quand il a enfin trouvé le moment, l’occasion, l’inspiration, l’argent, la force, peu importe, pour accoucher du film qu’il avait en lui depuis longtemps : THE CAPTAIN. Un long-métrage réalisé dans un Noir & Blanc aussi profond que l’abîme humain dans lequel il va entraîner le spectateur. Vous ne connaissez peut-être pas Willi Herold et pourtant son histoire est si singulière, si sidérante, bref si inimaginable, qu’elle mérite un film. Herold déserte l’armée allemande alors que la Guerre prend une mauvaise tournure pour les troupes d’Hitler. En cavale, il trouve un panier repas dans la voiture abandonnée d’un capitaine. Et aussi son uniforme. Il a froid et l’enfile. Mais ce vêtement lui donne soudain une autre force. Quand il croise un troufion à qui il donne un ordre, exécuté docilement, il bascule. Celui qui a tenté de s’échapper de l’horreur va désormais la semer. Il suffit pour cela qu’il affirme être le Capitaine Herold, haut militaire nazi, et tout le monde le gobera. Il faut voir le visage de Max Hubacher, courageux interprète de ce personnage terrible, se transformer en celui, implacable, d’un autocrate, pour vraiment croire à ce naufrage moral. Avons-nous tous en nous ce désir de domination ? Qui sommes-nous face à la possibilité du pouvoir ? Qu’est-ce qui fait basculer Herold du côté de l’inhumain? Le costume? L’opportunité? Par l’anecdote, Robert Schwentke fait la démonstration imparable de la barbarie qui s’installe et qu’on laisse exister, prospérer et tout dévorer. Il transcende son postulat de court-métrage (« Et si un déserteur trouvait un uniforme de gradé nazi ? ») pour raconter à nouveau l’orgie de violence qui régnait dans les camps de prisonniers et les soldats grotesques et pathétiques. C’est avec le plus grand des sérieux, des plans simples et des compositions machiavéliques que Schwentke manie l’humour noir. On a même pensé au muet et Chaplin n’aurait pas mieux tourné en ridicule les délires et la lâcheté nazis. Et pour ne surtout pas isoler Herold dans l’Histoire, comme on le ferait avec un mauvais rêve, Schwentke ose une scène finale (en fait, le générique) où le passé vient se rappeler au bon souvenir du présent: faut-il qu’ils portent des brassards pour qu’on reconnaisse et combatte les nationalistes et autres xénophobes de tous bords ? Y a-t-il vraiment des environnements protégés du totalitarisme, alors que de Charlottesville à Varsovie, de Dresde à Stockholm, des néonazis paradent aujourd’hui dans les rues ?

De Robert Schwentke. Avec Max Hubacher, Milan Peschel, Frederick Lau. Allemagne. 1h58. Sortie le 21 mars

4Etoiles

 

 

 

 

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